Héhéhé mis à part ces quelques allusions grivoises... d'autres témoignages ? ;D
Héhéhé mis à part ces quelques allusions grivoises... d'autres témoignages ? ;D
BenP : tu avait mentionné un point commun entre les Chinois et les Vietnamiens, c'était la tendance au regroupement (dans le sens communautaire, "entre eux"). Heureusement que tu précises que cela concerne les étudiants que tu as connus à Orléans !
De ce que j'ai pu voir en province et en Ile de France, mais aussi au niveau étudiant et surtout communautaire (c'est-à-dire les populations vivant en France, dont l'horizon de vie et de projet est la France), il me semble que les Français d'origine vietnamienne sont - à la différence de nombreux chinois - plus intégrés (mais aucun rapport avec l'accumulation de capital).
Comment l'expliquer ?
Je ne sais pas vraiment, mais je note que le Vietnamien est plus individualiste que le chinois, que son cercle "ethnique", c'est surtout sa famille et quelques couples d'amis. Résultat, cela leur laisse le loisir de se lier et de s'intégrer facilement dans la communauté nationale.
Les Chinois - pour ce que j'ai pu en noter - sont plus inscrits dans un cercle social du groupe ethnique, voire régional. Ils fonctionnent beaucoup en réseau, peuvent prêter de l'argent à des nouveaux inconnus venus de leur région -chose impensable chez les Vietnamiens, juste sur le conseil de certain membre de leur communauté. Ils vivent aussi très souvent en centre-ville (à Paris), dans des quartiers bien délimités, dans des appartements, là où les Vietnamiens préfèrent la banlieue, et, quand c'est possible, souscrire un crédit pour acquérir "un pavillon et une bagnole", c'est-à-dire le rêve pompidolien du début des années 70.
De même, ce n'est que depuis moins de 10 ans que l'on commence à voir des étudiants français d'origine chinoise.
Pour les trajectoires, on a souvent noté que les Chinois présents dans certains domaines, étaient surtout des Vietnamiens (en vrac, et de manière parfois anecdotique) :
- fac de math et physique
- fac de médecine (beaucoup - ceux qui habitent en ville - connaissent peut-être un Docteur Nguyen, Dr Tran ou Dr Pham...).
- écoles d'ingénieurs
- concours écoles de commerce
- fonction publique
- et restauration (eh oui...)... en province surtout.
en revanche, les Chinois sont très présents dans 3 domaines exclusif :
- le commerce agroalimentaire ethnique
- le commerce informatique
- le commerce textile
(et la restauration à Paris)
C'est en tout cas ce que j'ai pu remarquer dans mes études et celles de mes interlocuteurs.
Contrairement à l'expérience de BenP, j'ai trouvé les Chinois (ceux de Mainland China, qui ne sont pas passés par l'Indochine) faire des efforts pour être plus discrets que les Vietnamiens, sauf quand certains arrivés récemment parlent mandarin dans le métro parisien. En revanche, je les trouve nettement plus nationalistes que les Vietnamiens. Ces derniers ne font pas d'histoire quand on parlent de leur pays, sauf dans le cas d'une discussion très approfondie. En revanche, combien de Chinois et d'étudiants s'énervent vite dans leur esprit (mais gardant la face) pour nous dire que nous autres, Occidentaux, nous ne savons pas ce qui se passe réellement en Chine, car les médias occidentaux et américains n'aiment pas la Chine et veulent donner de ce pays des défauts qui ne sont que des déformations injustes. Posez leur des questions les autres pays d'Asie, ils ne sauront pas répondre à vos questions... sauf que Taïwan est chinois, que Taipei est chinoise...
Mais n'allez pas leur dire qu'ils n'ont aucune connaissance du Sud. C'est normal, ça compte pour portion congrue dans leur "cosmogonie des relations internationales".
Une fois, en summer school aux States, j'ai eu le malheur de baragouiner en madarin un truc du genre : "elle n'est pas chinoise", en parlant d'une jeune française d'origine chinoise, des camarades qui venaient directement de la Chine continentale m'ont pressé de ne plus jamais sortir une telle phrase car ne pas être considéré comme un Chinois "zhong guo ren" (= homme de l'Empire du Milieu) est vue comme une insulte, une bassesse. Une Taïwanaise à qui j'avais raconté la scène, assez inspirée, m'a dit que les Chinois du continent ont un complexe d'infériorité et de supériorité mêlé et que cela allait être difficile quand cette Chine complexée sera une puissance militaire de premier plan. Oops...
Enfin, j'ai remarqué que le taux de salarisation des Vietnamiens chez les Français étaient nettement supérieur à celui des Chinois. Ces derniers, quant ils sont salarisés, ils le sont le plus souvent officiellement à mi-temps chez des individus du même groupe éthno-régional, ce qui limite les points de contact avec la population française.
Dans ma scolarisation (elle reflète en tout cas pas mal ce qui se passe en province), je n'ai jamais rencontré un Chinois, sauf peut-être un Chinois du Cambodge ou du VN. En revanche, j'ai souvent croisé des Vietnamiens. Dans le journal local d'annonce du baccalauréat, c'est la même chose ; dans les listes d'étudiants aux différentes universités, idem.
eLiz, c'était donc ce que j'ai pu voir. De tous les propos que tu as eu sur ces regards croisés, tu as peut-être idée pour ton analyse sur le rapport entre les deux pays eux-mêmes.
Je pense que ce sont deux pays qui se sont regardés enchiens de faïence, surtout après la crise de 1979.
Malgré le processus de mondialisation qui gagne ces deux pays, voici quelques élements que l'on entends souvent :
- le Vietnam attend souvent quelques années que certaines lois fassent leurs preuve en Chine avant d'en faire autant,
- relations officielles de plus en plus amicales
- un Vietnam qui reste très méfiant sur son énorme voisin du Nord : le plus grand danger dans l'histoire du Vietnam a été du Nord (avec une parenthèse de l'Extrême-Ouest...)
- une Chine qui fournit de plus en plus de touristes venant du continent
- des conflits qui restent : définition des frontières (Cf. récent scandale 2004 des frontières tonkinoises que le VN d'Hanoi "aurait" cédé à la Chine en échange de son aide contre le VN du Sud), Spratley, Paracels. Pour la Chine, c'est définitifs, ces îlots sont chinois. Point.
- Le Vietnam se sent très isolé : la Chine pousse ses pions au Laos et au Cambodge, malgré le PM Hun Sen, réputé pour ses amitiés hanoiennes.
- Dans la tête de n'importe quel dirigeant vietnamien, qu'ils soient communiste ou un jour non communiste, il reste en filigrane la nécessité de considérer la Chine comme un souci. Le seul jour où les dirigeants seront tranquilles est celui où la Chine implose sous le coup de régionalisme, mais cela serait ridicule. Une Chine unie a toujours été pénible pour le VN.
Il reste une image célèbre pour résumer l'état des relations entre les deux pays : des estampes montrant des petits rats vietnamiens déposant des offrandes au gros chat chinois couché.
Mai a fait remarquer à juste titre que le mandarin est la seconde langué étrangère au Vietnam après l'anglais. Je doute en revanche de la signification de ce phénomène. C'est moins une volonté de se réconcilier avec la Chine pour comprendre l'histoire du VN (= vision très europeo-centrée) qu'une conjonction entre ouverture du pays et opportunité en Chine.
Plus une question d'avenir que de passé.
Ne pas oublier que le VN du XXe siècle (qu'en sera-t-il ce siècle-ci ?) n'est que très peut tourné vers les sciences humaines...
Dernière anecdote : lors du repli de Tchang Kai Chek, les USA aurat proposé de réserver le VN pour l'administrationde la République de Chine non communiste, Tchang aurait répondu aurait décliné, au motif que les "Vietnamiens [sont] inassimilables"... il n'y a qu'à voir l'histoire des relations entre les deux pays...
Philippe, ton intervention est tres constructive et interessante. J'ai pris un grand plaisir a lire ton temoignage...
Tu nous a fait profiter de ton experience des chinois, et je t'en remercie.
Sois heureux en rendant les gens heureux !
Ne fais jamais aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse...
eh oui Robin des Bois... on ne pourra jamais faire totalement abstraction du voisin du Nord... et puis tant mieux comme cela, on ne peut tourner le dos à une si puissante matrice culturelle.
La crise de 1979, c'est en fait le point culminant de la rivalité sino-vietnamienne en Indochine, qui a débuté au début des années 1970 (lorsque la Chine s'est rapprochée des Etats-Unis, qui étaient alors en guerre avec la RDVN), et qui s'est terminée avec le retrait vietnamien du Cambodge en 1989. Les relations sino-vietnamiennes n'ont jamais été rompues, mais elles ont été très distantes pendant cette période. Elles ont été normalisées en 1991, et ont tendance à s'améliorer régulièrement depuis, même si le Viêt-nam peut être méfiant à l'égard d'un voisin assez envahissant.
En février 1979, l'armée chinoise a attaqué les provinces frontalières du nord du Viêt-nam pour, selon les termes de Deng Xiaoping, "donner une leçon" au Viêt-nam. Hanoi avait fait la preuve de son indépendance à l'égard de Pékin depuis le début des années 1970, en s'appuyant sur l'aide soviétique autant que sur l'aide chinoise (la Chine et l'URSS étaient alors en froid), et en poursuivant l'objectif d'une réunification, projet que les Chinois redoutaient pour plusieurs raisons (d'une part, cela pouvait entraîner une intervention américaine plus musclée, ou un retour américain après 1973, stratégiquement dangereux pour la Chine, et d'autre part cela risquait de faire naître une puissance beaucoup plus forte que la moitié de Viêt-nam contrôlé par Hanoi).
La question de la souveraineté sur les archipels de la mer orientale (mer de Chine méridionale) a également commencé à apparaître à l'ordre du jour des relations bilatérales à cette époque, montrant l'insubordination du Viêt-nam à Pékin, et mettant plus en évidence son rapprochement progressif avec Moscou. Les autres questions de délimitation (frontière terrestre et golfe du Tonkin) sont également revenues sur le tapis à cette époque. Une autre question a également un peu plus envenimé les relations bilatérales, celle du traitement des Chinois du Viêt-nam, qui a été utilisée par Pékin comme prétexte supplémentaire pour fustiger le Viêt-nam (tandis que parallèlement Hanoi utilisait cette question pour faire la preuve de son insubordination).
Lorsque le Viêt-nam a attaqué les troupes cambodgiennes le long de la frontière sud, en décembre 1978, pour mettre fin à des escarmouches sanglantes en provenance du Cambodge, et a finalement renversé le régime khmer rouge, Pékin y a vu un casus belli, dans la mesure où Pol Pot et ses sbires étaient des alliés idéologiques et stratégiques de la Chine populaire, les derniers encore capables de lui assurer une influence dans l'ancienne Indochine française.
C'est l'ensemble de ce processus (très rapidement et un peu maladroitement résumé ici) qui a mené à l'attaque chinoise, qui n'a duré qu'un mois, qui a fait beaucoup de dégâts (les troupes chinoises ont pratiqué la politique de la terre brûlée), et qui a été assez meurtrière pour les deux côtés. Les troupes chinoises se sont retirées après seulement quelques semaines de combat, en affirmant avoir atteint leurs objectifs, mais également avec le constat qu'elles étaient beaucoup moins fortes que ce qu'elles pensaient : elles ont subi de lourdes pertes alors qu'elles ne faisaient face principalement qu'à des milices locales et à des gardes frontières, les meilleures unités de l'armée vietnamienne étant au Cambodge, d'où elles n'ont pu être rappatriées à temps pour participer aux combats.
Après le retrait chinois, c'est la présence vietnamienne au Cambodge qui a alimenté officiellement la défiance mutuelle sino-vietnamienne, mais il faut y ajouter l'arrimage du Viêt-nam au bloc soviétique et les questions territoriales (sur la frontières terrestre, dans le golfe du Tonkin, et en mer orientale/méridionale). L'ensemble de ces contentieux ont été réglés entre 1990 et 2000, à l'exception des délimitations de souveraineté et de ZEE en mer de Chine méridionale/mer orientale.
Il faut dire qu'après la normalisation sino-américaine au début des années 70, pour toute l'Asie du Sud-Est, le Vietnam est soudainement devenu la bête noir, un ennemi à abattre. Alors que les états du bloc anti-sovietique (France y compris) commence à faire la cour aux Chinois. Pour justifier l'invasion, certains journaux allant jusqu'à dire que l'armée chinoise a fait son devoir de protéger les Viets d'origine hoa... Mais au grand étonnement de certains Chinois du Cambodge, parce que Pékin n'a pas bougé un doigt pour les protéger de la purge khmer-rouge. A savoir : beaucoup d'entre eux ont pu garder leur vie en se rendant Vietnam qui leur permet ensuite d'être arrivés sain et sauf au en France.
Selon l'un de mes anciens collègues : Originaire de Hai Phong, pour éviter d'être enrôlé et envoyé combattre au Cambodge, il a décidé de s'enfuir et arrivé à Hong Kong dans la foulée des réfugiés composée de hoa du Nord : Alors, il a dit que la moitié des réfugiés dits hoa étant en réalité 100% viet qui ont profité la situation pour s'enfuir des misères due à l'embargo économique en vue de faire pression sur le Vietnam afin qu'il se retire du Cambodge.
Il est vrai que, durant le conflit sino-vietnamien, les Hoa du Nord ont dû subir des pressions, mais par rapport au sort réservé à des gens qui ont bossé sous l'ancien régime du Sud, alors ils n'ont rien à leur envier.
Bảo Nhân : fascination, impression and passion
Oui, la question des Chinois ethniques en Asie du Sud Est a été pas mal instrumentalisée par Pékin, et a été utilisée au gré des besoins de la politique étrangère de la RPC.
Mais en gros, pendant la période maoïste, les Chinois de l'étranger étaient vus, dans la lignée de la tradition impériale, comme des traitres ayant abandonné la patrie, alors qu'avec l'arrivée de Deng Xiaoping au pouvoir et la volonté naissante de faire participer les chinois d'outre-mer au développement de leur pays "d'origine", la tendance s'est inversée.
Ce qui explique en partie que des conseillers militaires chinois ont assisté les khmers rouges -qui ont notamment exterminé ou fait fuir la quasi totalité des Cambodgiens d'origine chinoise- et que 3-4 ans plus tard, Pékin est monté sur ses grands chevaux lorsque la lutte de la RSVN contre le capitalisme au Sud a atteint principalement la communauté hoa.
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