Bonsoir Risk,
Le culte des ancêtres doit être considéré comme la "religion" la plus pratiquée par les Vietnamiens, qu'ils soient bouddhistes, chrétiens ou... athées (tout comme chez les Chinois d'ailleurs).
Ce culte a des origines très anciennes, où le confucianisme (piété filiale), le taoïsme et le bouddhisme se sont mélangés aux croyances animistes locales.
D'ailleurs, le terme plus approprié est le "culte des défunts" car on honore non seulement les ascendants défunts, mais aussi les enfants décédés.
Pour ce culte, on a dans la maison du "fils aîné" un "autel des ancêtres", avec leurs photos (ou simplement un
bài vị, c'est-à-dire une plaque sur laquelle sont inscrits le nom du défunt, sa biographie, etc...). L'autel comporte en plus au minimum un pot pour baguettes d'encens et des lampes ou des bougies (l'héritage se dit en vietnamien
hương hỏa ou
encens et feu), des tasses de thé, un pot de fleurs, etc...
Ce culte commence par les rituels qui accompagnent le décès, les obsèques du mort, et les règles contraignantes du deuil.
Puis, on honore les défunts à leur anniversaire de décès chaque année, lors des fêtes importantes comme le Nouvel An, et lors des mariages, etc..., en leur offrant un repas fait des meilleurs plats (selon la capacité financière de chaque famille), accompagné de salutations (révérences et/ou prosternations) et d'invocations par les membres de la famille présents (plus exactement la "grande famille" ou clan). On peut aussi offrir des objets factices en papier ou
mã (vêtements, voiture, meubles, billets de banque, lingots d'or, etc...) qu'on brûle après la cérémonie (la fumée est censée d'apporter ces objets aux morts pour pourvoir à leurs besoins dans l'au-delà). Après que la cérémonie est terminée (souvent à la fin de la combustion des baguettes d'encens), le repas est partagé par les membres de la famille présents.
Ce culte est le grand facteur de la cohésion familale (et sociale) des Vietnamiens, qu'ils soient au pays ou d'outre-mer.
Bien que le P. Alexandre de Rhodes, s.j., ait écrit dans son
Histoire du Royaume de Tunquin (1651) : "Il n'est peut-être point de nation en toute la terre habitable qui ait rendu plus de devoirs, et plus respectueusement, aux âmes et aux corps des Trépassés que les peuples du Royaume d'Annam" (p. 80), et "...il y a deux mois [lunaires] dans l'année, le septième et le dernier, qui sont destinés pour tous ceux du peuple à célébrer la mémoire de leurs parents défunts, à quoi personne ne manque. Ce qui devrait faire honte aux Chrétiens, qui sont moins soigneux de rendre ces devoirs de piété, et de charité, aux âmes des Trépassés, à qui leur suffrages peuvent beaucoup servir, que ne sont les Païens..." (pp. 88-89), ce culte des ancêtres a été un des éléments importants qui ont déclencé la "querelle des rites" dans l'Eglise Catholique aux XVIIè et XVIIIè siècles. Il a fallu attendre le Concile de Vatican II (1962-1965) pour que ce culte soit autorisé aux catholiques vietnamiens.
A ce sujet, voici un article assez intéressant sur le site
Regard sur les catholiques vietnamiens : Scènes du Vietnam.
Bien amicalement.
Dông Phong