› La Langue vietnamienne / Tiếng Việt › le vietnamien / Tiếng Việt › Utilisation du mot manger dans les expressions
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28 avril 2007 à 11h29 #1966
http://www.netasie-vn.com/mond-doss-conn-manger-eng.htm
Manger et nourrir les relations
By LE Huu Khoa
Directeur du Centre d’Ethnologie et de Sociologie Université de Lille 3Manger et aimer : l’ordre du sentiment
Manger et travailler : la base de la vie commune
Manger et respecter : le soin des descendants
Manger et se comporter : la vigilance dans l’interaction
Manger et se lier : la conséquence des actes
Manger et manipuler : l’espace des intrigues
Manger et gouverner : les écarts du pouvoir
Manger et deviner : l’environnement de l’imaginaire
Manger et disserter : la vicissitude des saveurs
Manger et émigrer : la gestion des dettes
Manger et relativiser : l’exigence relationnelle
Notes
Références bibliographiquesAu cours d’une rencontre entre spécialistes de Ia littérature vietnamienne, un professeur français s’étonnait, en questionnant une romancière vietnamienne, de l’abondance du verbe « manger », tout au long d’un roman d’amour. Cette remarque, loin d’être anodine, pourrait s’appliquer à un ensemble bien précis, celui des aspects de Ia société vietnamienne. Pourquoi ce verbe envahit-il, en effet, tant d’expressions vietnamiennes au niveau des relations humaines, amicales, sentimentales? Serait-il précisément une des caractéristiques de l’idiome vietnamien ? An1 – manger – porte une double signification. Littéralement, an2 signifie manger – l’acte de manger pour se nourrir, – an prend, en deuxième lieu, un caractère social puisque, associé avec d’autres verbes, il permet de décrire tout aussi bien l’univers complexe propre à un individu que ses relations avec Ie monde extérieur.
Manger et aimer: l’ordre du sentimentLa vie de couple, en concubinage ou après Ie mariage, se dit en vietnamien an o -manger-habiter. Une union chargée d’amour et de partage se traduit par an nam -manger-allonger. L’événement heureux célébrant I’union de deux êtres qui s’aiment s’exprime par an cuoi – manger-mariage. Cependant la vie de couple est aussi remplie d’épreuves et il arrive que Ie sentiment ne parvienne à triompher des contraintes. Certains ne savent pas gérer Ies rapports de force dans Ies interactions quotidiennes de Ieur couple ni répondre aux exigences de l’économie familiale, face aux dépenses excessives. An permet alors de décrire les couples dépensiers ou ceux incapables par exemple, de surpasser une infidélité. Ceux-Ià recourent à Ia vengeance sentimentale qui ne laisse aucune place aux concessions mutuelles:
Ong an cha, ba an nem
ong them xoi nuoc, ba them banh canh
(Quand il mange du pâté, elle-même peut vouloir manger du saucisson,
Quand il rêve d’un dessert, elle peut aussi réclamer un potage)Or une des qualités essentielles d’un individu réside dans sa capacité à évaluer Ie juste milieu, à pondérer ses actes dans Ia gestion de son budget réservé à Ia nourriture, à équilibrer ses dépenses et ses économies:
an het thi ga con an con thi mat vo
(si l’homme mange tout, il vend sa fille en la mariant
si l’homme mange peu, il perd sa femme)Cette expression traduit deux situations celui qui mange tout dépense finalement sans compter, sans tenir compte de ceux qui l’entourent et celui qui mange peu est avare, il ne pense qu’à lui et peut perdre ses proches à tout moment.
Les relations sociales dans Ia civilisation vietnamienne sont gérées par Ie confucianisme plus que par Ie bouddhisme ou le taoïsme; l’éthique du travail régit alors les rapports humains. Vouloir réussir sa vie professionnelle apparait comme une vertu pour l’être social. Cette volonté se traduit en vietnamien par chi lam an – Ia volonté de travailler-manger. L’expression vietnamienne confère à cette volonté un sens plus aigu et s’inscrit dans les relations sentimentales. Un homme, déterminé à gagner sa vie avec ardeur, garde Ia même exigence vis-à-vis de ses relations amoureuses:
Khen nang co chi lam an
Biet duong tinh toan biet phan ban buon
(Je te félicite d’avoir la volonté de travailler-manger,
de savoir calculer et mener à bien les affaires).Aimer, dans ce contexte culturel, représente le partage des tâches autant professionnelles que domestiques. Les femmes, elles-mêmes, ont leur propre critère sur le choix d’un époux et secrètement, elles suggèrent:
ai oi cho lay hoc tro,
dai lung ton vai, an no lai nam.
(Je vous conseille de ne pas vous marier avec des étudiants,
leur dos long vaut cher en tissu, ils ne savient que festoyer et s’allonger)L’image d’un dos long qui désigne les hommes qui abusent des plaisirs de Ia vie est renforcée par le proverbe suivant: cho sung rung décrit les individus qui attendent que les figues leur tombent droit dans Ia bouche ou encore que les figues leur tombent du ciel.
Début
Manger et travailler: Ia base de la vie communeSavoir aimer et savoir travailler sont ainsi deux connaissances indissociables. Même au sein d’une relation amoureuse, La reconnaissance de l’effort doit être respectée, seul celui qui travaille mérite un repas.
Co lam moi co ma an
khong dung ai de dem phan den cho
(Quand on travaille, on a le droit de manger,
personne ne sera disponible pour nourrir les autres).Les dictons de la culture populaire traversent le temps, demeurent vivaces d’abord dans I’éducation familiale et restent efficaces dans leur représentation au sein des relations sociales. Chez les Vietnamiens, un dicton en cache souvent un autre quand il s’agit de nourriture. Mutuellement, ils se renforcent et s’entretiennent dans la croyance collective et précisent ainsi le statut, la place et la fonction de chaque membre du groupie. Le dicton:
muon an thi Ian vo bep
(celui qui souhaite manger doit rouler son corps rapidement vers la cuisine)
se combine avec:
mieng doi dau goi phai bo
(quand la bouche a faim, les genoux savent glisser).La culture confucéenne privilégie la compétition d’abord scolaire puis professionnelle en brandissant I’image menaçante de la misère et de la famine. L’expression suivante qui reflète cette conception représente une des bases éducatives essentielles pour la famille et l’école.
tay lam ham nhai, tay quai mieng tre
(les bras travaillent, la mâchoire s’active, des bras croisés, une bouche béante).Les chants populaires rythment la jounnée de labeur dont Ie sens s’oriente selon une motivation bien précise, manger. Ainsi un bol de riz apparaît comme une récompense très convoitée:
Keo cua lua se,
ong tho nao khoe, ve an com vua
ong tho nao thua ve bu ti me
(les scieurs au travail, l’ouvrier robuste peut gagner Ie riz du roi,
l’ouvrier pendant doit revenir téter au sein maternel).Souvent, la métaphore de la nature encense la patience, la persévérance. Et à force de ténacité, d’endurance, pouvoir manger intervient comme Ie couronnement de ces bonnes actions. L’acte de manger se fond dans une dimension temporelle, il persiste et se délaye dans la durée:
giong cay co ngay an qua
(on plante des arbres et un jour on mangera leurs fruits).Avec ce premier repère, il devient alors possible de concevoir sa vie en termes de projet, d’investissement, en vue d’un avenir prometteur et concret.
mai lam mai an
(demain on travaillera, demain on mangera)rappelle que Ie travail est la condition sine qua non pour mériter un repas. Ainsi dans l’éducation populaire entre la famille et l’école, un adulte trouve ses repères sociaux dans la constance de ses efforts professionnels:
co lam moi co an
(travailler puis manger).L’éducation tend à mettre en valeur les chants populaires parce qu’ils dégagent, parallèlement aux pnoverbes, une moralité pédagogique. Ils démasquent les individus qui rechignent au travail, vivent au jour Ie jour en réalisant leurs intrigues quotidiennes grâce à de « belles paroles »:
an nhu rong cuon, noi nhu rong leo, lam nhu meo mua
(manger comme un dragon qui se déploie,
parIer comme un dragon qui grimpe
mais travailler comme un chat qui vomit)Manger et respecter: Ie soin des descendants
D’une rencontre ordinaire aux relations intimes, an – manger – s’utilise dès le début d’une conversation entre deux individus. Ce verbe cadre les positions des intéressés et tout au long des échanges demeure une référence de civilité pour l’un et l’autre. Ainsi Iorsque deux Vietnamiens se croisent dans la rue, selon leur habitude, ils entament leur conversation par cette question: an com chua ? (avez-vous déjà mangé ?). On remarque à travers Ia traduction littérale que « manger » se dit en vietnamien an com (manger du riz), le riz demeure ainsi un élément indissociable des interactions quotidennes. Dans la société vietnamienne, caractérisée par la civilisation du riz et la pratique du culte des ancêtres, I’individu, par son attitude face à Ia nourriture, démontre tout son respect envers ses ancêtres. Son mode alimentaire prend une dimension spatio-temporelle puisqu’il doit garder en mémoire les dates de décès de ses ancêtres afin de pouvoir réunir ses proches autour d’un culte appelé an gio (manger-vénérer les ancêtres). En revanche, pratiquer à outrance, c’est-à-dire offrir en abondance aux disparus signifie aussi l’oubli de ses proches, des vivants, ceux qui savent apprécier un bon repas ou tout simplement ceux qui ont besoin de se nourrir. Le proverbe suivant, s’affirmant comme critique sociale, enseigne aux individus et aux familles la considération d’une éthique des vivants face à une pratique excessive du respect des ancêtres:
song thi chang cho an nao
chet thi cung gio mam cao co day
(pourquoi ne pas laisser manger les personnes en vie
et pourquoi vénérer les morts avec des plats débordant de nourriture).Cette critique peut à tout moment prendre une tournure agressive envers Ies personnes qui ne pensent qu’aux disparus et négligent les vivants. L’individu doit organiser son quotidien sur deux modes temporels indissociables tant Ie passé que le présent. On vénère les disparus mais on s’occupe aussi de ses proches encore en vie:
song thi con chang cho an
chet thi soi thit lam van te ruoi
(Pas de nourriture quand on est en vie,
quand on est mort, Ie riz et Ia viande vénèrent inlassablement les mouches).Le devoir d’assurer Ie repos des disparus et la bienveillance envers son prochain s’apprennent dans Ia relation éducative réglée par I’autorité parentale où l’enfant accepte inconditionnellement Ia hiérarchie familiale. Ici Ie verbe manger sert à exposer les principes de l’éducation familiale:
Ca khong an muoi ca uon
Con cai cha me tram duong con hu
(Si les poissons ne savent pas manger du sel, ils seront pourris,
Si les enfants ne respectent pas la parole des parents, ce seront des enfants perdus).La volonté des parents forge la base de l’unité familiale. Pour que cette unité soit durable, les enfants doivent reconnaitre Ie sacrifice des parents et à leur tour, ils seront prêts à se sacrifier pour Ieurs aînés. Le chant populaire à but éducatif cadence en permanence les paroles des aînés:
Doi long an dot cha Ia
de com nuoi me me gia yeu rang
(Quand l’enfant a faim il peut manger les tiges du pruneau,
il réserve le riz pour sa mère car elle a les dents faibles)Le sacrifice révèle une solidarité parfaite entre les êtres d’une même lignée. La métaphore du mariage entre Ie riz et d’autres aliments s’utilise pour exprimer la piété filiale:
Com voi ca nhu me voi con
(Le riz va avec Ie poisson comme la mère avec ses enfants)Une famille solide se définit par l’efficacité de son entraide au sein de ce groupe et doit donc s’ouvrir aux gendres et aux brus. Pour ces nouveaux arrivants, Ie sacrifice moral est alors réciproque et se concrétise à travers Ies aliments:
Rau muong thang chin
nang dau nhin cho me chong an
(Le liseron d’eau pousse en septembre
La bru n’en mange pas et Ie réserve pour sa belle-mère)La littérature populaire de ce monde confucéen abonde de nombreux mythes et Iégendes sur Ies sacrifices des parents pour leurs enfants. Le devoir des cadets envers leurs aînés entraîne aussitôt la responsabilité des aînés pour leurs cadets. An – manger – dans l’espace familial suggère une compréhension au second dégré: partager et sacrifier. Cependant, la responsabilité des parents prédomine dans les relations familiales. Le père et la mère doivent surveiller chacun de leurs actes en anticipant dans Ie temps. L’expression « Qui sème Ie vent, récolte la tempête » dépasse ici l’individualité d’un Vietnamien pour se perpétuer à travers les générations imprégnées de trois longues traditions Ie bouddhisme, Ie confucianisme et Ie taoïsme:
doi cha an man doi con khat nuoc
(si le père mange salé tout au long de sa vie, plus tard, ses enfants auront soif)Manger et se comporter: Ia vigilance dans l’interaction
Un proverbe populaire met en valeur trois choses précieuses de la vie:
Cam an, cam noi, cam cuoi
cam ba dieu ay con vui noi gi
(interdiction de manger, de parler et de s’amuser
ces trois choses interdites, il n’y aura plus de quoi se réjouir)On décèle, par ailleurs, une autre complexité culturelle du pays dans la corrélation entre Ia nourriture et l’amour porté envers ses proches en Ies respectant. Le dicton suivant apparait non seulement comme Ie guide d’une éthique collective mais aussi comme le code du savoir-vivre. L’individu doit tenter constamment, à travers Ie raffinement d’accéder à Ia noblesse sociale, de s’élever dans Ia hiérarchie sociale:
an thi an cho het
het thi het cho con
(quand on mange on doit tout finir
Mais à la fin, il doit toujours rester quelque chose)Ici, les interprétations sont multiples. On retiendra celle qui valorise l’éducation familiale, scolaire, sociale dans la formation d’un individu. Son attitude dans ces différents contextes relationnels se décode par son comportement au cours d’un repas collectif. On peut réunir, dans une typologie assez riche, des expressions qui associent Ie verbe an – manger – avec un autre verbe pour traduire un large éventail des comportements entre les individus, ainsi:
– an noi (manger-parler) décrit l’attitude d’un être éduqué, civilisé, attentif aux bonnes manières lorsqu’il s’attable et soucieux de Ia véracité et de Ia crédibilité de ses propos, se référant au double registre de Ia vérité et de la moralité.
– an hoc (manger-étudier) rappelle Ie devoir d’un être humain envers l’éducation notamment l’instruction. Car dans ce monde confucéen, la première qualité humaine réside dans Ia capacité à reconnaitre le sacrifice de sa famille qui lui offre les meilleurs aliments, indispensables pour sa réussite scolaire.
– an choi (manger-s’amuser) désigne différentes situations sociales. Dans le premier cas, on prend des amuse-gueules en début de chaque repas pour ouvrir l’appétit. Le deuxième sens s’apparente à un contexte de joie et de fête rurales après Ia récolte et les travaux agricoles laborieux. Enfin Ie troisième sens vise Ies individus qui ne pensent qu’à se divertir et oublient Ieurs devoirs familiaux.
– an tet (manger-nouvel an) marque l’événement à la fois majeur et joyeux de chaque Vietnamien qui peut profiter pleinement de Ia vie pendant plusieurs jours au sein de sa famille au début de Ia nouvelle année-lunaire.
– an qua (manger-entremet) s’attribue aux individus qui aiment manger à n’importe quel moment de Ia journée sans respecter Ia répartition équitable entre Ies trois repas principaux quotidiens. Cette expression dévoile Ia recherche du plaisir gastronomique dans la rue, hors des lieux formels familiaux.
– an vat (manger-grignoter) accuse une personne qui mange à n’importe quel moment de la journée mais peu soucieuse quant à Ia qualité et Ia quantité de Ia nourriture.
– an vung (manger-cacher) culpabilise les individus qui mangent en cachette sans respecter les repas familiaux. Au sens moral, cette expression dénonce l’adultère, l’infidélité et l’irresponsabilité dans Ia relation sentimentale.
– an boc (manger-arracher) est réservé aux individus qui ne respectent pas le rituel collectif, familial autour d’une table. Par exemple, ils ne se servent pas de baguettes et mangent avec les doigts d’une façon brusque. Cette expression s’applique, en fait, aux individus qui ne respectent pas la hiérarchie sociale.
– an giut (manger-soutirer) s’emploie pour les êtres malhonnêtes capables de voler le bien d’autrui. lls n’ont aucune crédibilité aux yeux du groupe et ne respectent aucune parole ou promesse.
– an hai (manger-nuire) met en cause des individus inutiles pour la famille et Ia societe. En mangeant, ils détruisent les ressources du groupe et peuvent être alors considérés comme des parasites.
– an chiu (m.anger-subir) ou an thieu (manger-manquer) désigne tout individu qui mange sans pouvoir payer. Il mange et vit en éternel débiteur.
– an va (manger-supplier) décrit la mise en scène d’un individu qui utilise ses larmes comme moyen de pression afin d’imposer sa volonté ou ses calculs au détriment des autres.
– an xin (manger-quémander) ou an may (manger-quêter) est l’image sociale des mendiants ou de ceux qui se nourrissent grâce à la charité ou la pitié d’autrui.
– an Ioi (manger-bénéfice) est l’expression sociale du profit, du bénéfice, de l’intérêt pratiqué souvent de façon abusive à travers les actions commerciales ou Ie prêt à des taux élevés.
– an trom (manger-cambrioler) incrimine les cambrioleurs nocturnes. Ils fuient Ie jour car ils craignent les activités sociales et professionnelles conformes.
– an ke (manger-intrus) blâme les individus sans pudeur qui profitent des repas communautaires ou de la nourriture collective. Cette image décrit aussi l’individu qui exploite Ie bien des autres pour son propre compte.
– an khop (manger-articuler) donne l’image de la parfaite synergie dans les travaux comniunautaires et les actions communes. Synchroniser les efforts individuels pour l’harmonie du groupe révèle la double qualité de chaque membre : la discipline de chacun pour l’objectif collectif et son aptitude à maintenir une harmonisation durable.
Dans Ia configuration sociale, certains critères viennent codifier les comportements des individus face à Ia nourriture. Sur le plan amical, il est formellement déconseillé de fréquenter cette catégorie de personnes:
– an ngat mat ngap mui (celui qui mange en immergeant sa figure et son nez), un tel individu mange sans se soucier de la réserve collective, aussi hypothèque-t-il le sort de l’environnement auquel il appartient. Au niveau des relations plus intimes, amicale ou sentimentale, il faut savoir éviter une autre catégorie d’individus:
– kho an kho o (qui est difficile sur la nourriture, sera difficile à vivre) nous avertit que les goûts culinaires de certains individus et Ieur façon de vivre permettent éventuellement de déchiffrer leur caractère hostile. En somme, ce sont des sujets peu sociables.Manger et se lier: la conséquence des actes
Le savoir-vivre est aussi savoir transformer une attitude en aptitude. Un comportement moral et éducatif résulte souvent de longues expériences collectives. L’atout éducatif d’une personne est le fruit des ressources de son groupe. Forger les valeurs éducatives pour soi-même revient à expérimenter sa personne dans des relations sociales complexes et à se mettre en garde face aux actions négatives, malveillantes. « Manger » explicite dans certains contextes la notion de bien-être:
– an hien o lanh (manger en douceur et habiter en paix) traduit la capacité à maintenir l’harmonie dans le milieu. L’individu vertueux qui gère en paix ses relations, armé de sa compassion, connait alors la douceur de vivre. Avec ces mêmes critères éthiques, il est capable, même seul, de juger la croyance religieuse, l’engagement idéologique. Il reste ainsi lucide contre le dogmatisme et le totalitarisme qui menacent sa liberté et ceile d’autrui.
– an coi noi ngoi coi huong (manger en surveillant la marmite et s’asseoir en surveillant autour de soi) propose les règles de politesse. Chaque individu doit penser aux autres par des réflexes de partage quand il est à table. Le plaisir de la bonne chère réside dans Ia joie de l’apprecier ensemble. Mais plus contraignante que la courtoisie, cette règle impose un automatisme éducatif en vue d’atteindre l’harmonie du groupe. Parmi les siens, il doit être actif dans l’agencement de l’ordre; et grâce à cette connaissance, la collectivité peut éliminer le désordre:
– an chuc nam cho (manger-guetter, allonger-attendre) suggère Ia persévérance et Ia patience dans les contextes difficiles. Car dans les conjonctures défavorables, la ténacité et l’endurance permettent de franchir les obstacles. Mais les expériences sociales sont riches et variées, la même expression peut désigner soit la dépendance d’une personne vis-à-vis d’une administration bureaucratique opaque; soit la perte d’indépendance d’une personne qui attend un jour meilleur. Dans les deux cas, la résistance devient un acte nécessaire face au temps parfois hostile aux hommes.
– an hoi lo (manger l’argent de la route) donne une image sociale de la corruption. La bureaucratie correspond à des chemins difficiles et des portes infranchissables comme le péage, imposé au temps féodal par les mandarins et à notre époque par les hauts fonctionnaires.
– an noi coc loc (manger-parler d’une façon saccadée et hachée) désigne Ies individus peu respectueux qui communiquent sans maîtriser les rites de politesse et de courtoisie.
– an xoi o thi (manger-rapidement, habiter-provisoirement) dénonce les individus sans retenue, sans souci, ni respect vis-à-vis de leur environnement familial, leur travail et leur habitat. La propreté et Ia patience dans l’investissement sur le lieu de vie leur sont étrangers.
– lam choi an that (travailler en jouant, manger réellement) offre une représentation sociale d’une catégorie qui travaille sans conscience professionnelle ni rendement. En revanche, ils sont capables de manger et de profiter aisément en dehors des heures de travail. Au sein d’un groupe, ils deviennent des « bouches inutiles ».
– an hoang sai phi (manger sans contrôle, dépenser sans limite) décrit celui qui dépense sans aucun souci de conserver son économie personnelle, sans respecter les normes de l’épargne collective.
– an tuc noi phet (manger-avaler, parler-outrager) décrit un individu néfaste pour ses proches, il n’aime que manger. Chaque fois qu’iI mange, on Ie soupçonne aussitôt d’un mensonge.
– an tren ngoi troc (manger en haut, s’asseoir au sommet) esquisse Ie caractère des individus qui jouent abusivement de leur pouvoir et profitent de la domination en place pour exploiter davantage les siens. L’attitude est doublement détestable, car elle fait preuve d’égoïsme et surtout d’injustice. Celui qui ne travaille pas en profite le plus dans la vie matérielle.
– co dam an xoi (encaisser les coups, manger Ie riz gluant) produit ici I’image de ceux qui accepcent l’humiliation pour survivre ou de ceux qui perdent leur dignité afin de subsister. Dans ce groupe d’individus, on compte aussi ceux capables d’abandonner leurs proches à travers les épreuves et les vicissitudes par intérêt personnel.
– an trang tron doc (manger-blêmir, les nerfs à vif) dépeint manifestement les individus qui ne connaissent pas les bonnes manières. Leur égoïsme surgit de façon incontrôlée ; ils mangent en avalant aussitôt sans faire fonctionner leurs mâchoires. En conséquence, ils se mettent facilement en colère et ne pensent qu’a Ieur bien-être, à court terme.
– an tuoi nuot song (manger-frais, avaler tout cru) rassemble les individus gourmands. Sans aucune maîtrise de soi dans leur socialisation, is manquent notammemt de respect envers autrui et nuisent ainsi à la collectivité par leur brutalité et leur agressivité.
– an chao da bat (manger la soupe et casser Ie bol) représente la trahison. Celui qui dénie la reconnaissance, Ie remerciement et oublie aussitôt sa dette après avoir profité d’autrui.
– an thua du (manger en s’engageant complètement) expose Ie caractère des individus qui perdent leur contrôle dans Ies jeux ou dans l’engagement. Ils ne savent pas reculer et calculent aveuglément. IIs acceptent ainsi de payer cher, leur action et leur combat.
La bouche apparait souvent comme un élément essentiel dans deux actes quotidiens manger et parler. Sur cette base, l’individu petit ainsi contrôler son éthique dans ses relations en société:ai oi an noi de chung
co mom co mieng xin dung chua ngoa
(un être humain doit manger et parler tout en se surveillant
être conscient d’avoir une bouche et ne pas tomber dans la méchanceté).Manger et manipuler: I’espace des intrigues
Le foyer des relations se définit souvent comme un lieu dangereux. La tricherie, Ie mensonge, l’intrigue, voire la manipulation soutiennent les machinations dans diverses interactions sociales. Le verbe an – manger aide à suggérer plusieurs attitudes: la méfiance, la vigilance et surtout l’intransigeance face à Ia malhonnêteté dans différents contexts.
– an co di truoc loi nuoc di sau (manger le festin en avançant, traverser Ie cours d’eau à reculons) concerne les individus qui ne pensent qu’à profiter de la bonne nourriture, évitent Ies épreuves, prêts à abandonner leur groupe. Personne ne pourra alors compter sur eux aux heures difficiles.
– ke an oc nguoi do vo (l’un mange les coquillages, l’autre débarrasse les coquilles) dénonce la manipulation directe, la domination des uns sur Ies autres. Les uns qui profitent toujours plus que d’autres au nom d’une corporation. Ce proverbe souligne aussi, dans le contexte d’une décision collective, le jeu puissant d’un individu dont les ruses sont peu discernables aux yeux du groupe. Mais cette personne dévoile son autorité quand elle s’approprie les bénéfices des actions communes.
– khon an cai dai an nuoc (le malin mange le plat résistant, l’idiot mange le bouillon) impose à l’individu la capacité de distinguer l’essentiel du provisoire. C’est-à-dire, discerner le gain de la perte dans une association, un projet communs. La manipulation reste toujours possible tout au long d’une collaboration, même à terme lors du partage des profits, des intérêts.
– coc mo co an (le cormoran cherche la nourriture, l’aigrette Ia mange) ainsi que d’autres proverbes offrent, par Ia voie de la culture populaire, un tableau de la nature coloré et animé. Ainsi, habilement ils jouent sur la ressemblance entre les espèces animales voisines pour démontrer la manipulation au sein de l’espèce humaine.
– cu keu cho ma an (le hibou crie pour que le fantôme mange) évoque I’acte irréfléchi de certains individus qui peinent ou « se plient en quatre » pour que finalement les autres en profitent sans scrupules. Inconsciemment, ils causent le plus souvent des effets négatits pour le groupe et des conséquences néfastes pour leur milieu, ainsi que des entraves au bon déroulement de la justice.
– khong an thi doi an roi bi troi (si on ne mange point on aura faim, si on mange on sera ligoté) explicite les rapports délicats et Ies liens subtils dans les relations fondées sur les intérêts matériels. Ici, chaque individu responsable doit gérer correctement la dette envers autrui au cours d’un simple repas. L’acte de partager la nourriture inculque à l’individu, la reconnaissance envers celui qui l’a soutenu dans les moments difficiles et l’aide à maintenir d’une façon immuable son souvenir. A l’heure propice, il peut ainsi règler sa dette envers son bienfaiteur.
– troi qua bao, an chao gay rang, an com gay dua, xia rang gay chai (quand le ciel veut se venger, si on n’avale qu’une soupe de riz, on se cassera les dents, si on mange du riz les baguettes casseront, si on se cure les dents, on cassera la rame) soutient l’existence indiscutable d’une justice céleste. L’auteur du mal sera un jour sa propre victime, sanctionné par son univers quotidien dans lequel même les objets familiers n’obéissent plus aux ordres de celui qui a trahi son groupe.
– an thi an nhung mieng ngon, lam thi chon nhung viec con con ma lam (Quand il s’agit de manger, il prend les meilleurs morceaux, quand il s’agit de travailler, il cherche volontairement des tâches minimes) révèle une catégorie d’individus qui négligent l’éthique du travail en profitent sans cesse du résultat et du fruit des travaux collectifs. Plus encore, ils manquent de motivation dans les tâches communautaires mais ne manquent pas de saisir l’occasion pour profiter des festins du groupe. En négligeant leurs devoirs, ces parasites pensent être « plus intelligents » que les autres, s’avancent masqués dans la société, persuadés que Ieurs manoeuvres ne seront pas dévoilées. Le monde des proverbes populaires vietnamiens ne cautionne pas ce genre d’individus:
– tien trao chao muc (l’argent versé, la soupe donnée) détermine l’éducation collective capable de proposer dans la société les contrats justes aux personnes qui semblent oublier trop souvent les règles élémentaires à savoir: avancer leurs ressources, partager le fruit de leur travail afin de bénéficier des repas quotidiens.
– ga que an quyen coi xay (le coq boiteux mange autour du moulin) désigne l’individu qui a perdu son indépendance et vit en assisté grâce à la pitié de la collectivité. Ce proverbe accuse toute personne qui profite de la nourriture de ses proches en exploitant son handicap physique. En utilisant systématiquement son infirmité, il perd toute sa dignité.
Savoir dénoncer Ia manipulation dans les relations sociales, dans les rapports professionnels ou encore dans les liens familiaux implique la lutte contre l’injustice dans la division du travail et le partage des biens. Selon la croyance populaire, l’existence ne comporte pas qu’une série d’injustices et ne fige pas la domination comme une situation irréversible. La richesse et la noblesse un jour, Ie déshonneur et la misère un autre imagées respectivement par Ie merle et Ie phénix:sao doi thi sao an da,
phuong hoang luc doi cuc ga cung an
(le merle a faim, il sait manger Ie banian3,
quand le phénix aura faim, il devra manger les excréments de la poule).Manger et gouverner: les écarts du pouvoir
Le proverbe que répètent volontiers les Vietnamiens troi danh tranh bua an (même si Ie ciel veut nous frapper, il doit nous éviter aux heures des repas) sacralise Ie moment où l’homme se nourrit. Ainsi les repas communautaires à l’occasion des fêtes nationales et villageoises prennent davantage un caractère sacré par rapport aux repas quotidiens. Pendant la fête du têt nouvel an des Vietnamiens – par exemple, depuis les préparatifs à la réalisation, l’envahissement des saveurs, des odeurs de la bonne chère, en famille, entre voisins et citoyens, anime une certaine allégresse où cesse toute activité sociale afin de privilégier les jeux. Ces festivités, combinaison de divertissements et de bons repas provoquent la bonne humeur générale qui dépasse toutes considérations religieuse, politique, sociale, sans pour autant oublier de partager cette joie avec les disparus à travers le culte des ancêtres. Les forces antagonistes sur le plan idéologique, social, culturel doivent en tenir compte tout au long de l’histoire du Vietnam. Pourtant d’affrontements en affrontements entre la force militaire du pays et l’armée chinoise venue du nord, puis l’armée de Champa au centre du Vietnam actuel, Ie général Ly Thuong Kiet au XIe siècle instaure une stratégie. Il attaque par surprise au coeur de l’approvisionnement alimentaire du camp adverse. Plus tard au XVIIIe siècle, pendant les années noires du peuple vietnamien sous l’invasion chinoise et son occupation terrifiante, le meilleur stratège de l’époque, Quang Trung décide d’anticiper sur le nouvel an. Il organise un véritable têt pour ses soldats quelques jours avant la date officielle afin qu’ils soient disponibles pour attaquer l’ennemi pendant la fête. La surprise tactique est alors totale. Un tel coup de théâtre reste Ie facteur décisif dans Ie champ militaire pour un peuple considéré comme Ie faible luttant contre Ie fort, les Chinois, les Japonais, les Français et les Américains. On se souvient encore lors du Têt mâu thân – nouvel an de l’année du singe – en 1968, au Sud du Vietnam, lorsque les forces de la résistance et celles du Nord ont adopté ce plan aux heures critiques de la guerre du Vietnam. L’art de l’offensive par surprise, aux heures sacrées du repas populaire, avoisine parfois l’art de gouverner. Pendant les deux résistances – ou les deux guerres – contre les présences française puis américaine, une inspection s’imposait à chaque fois sur un corps de l’armée. On se souvient, qu’à plusieurs reprises, Ho Chi Minh visitait d’abord les cuisines et vérifiait Ia qualité de la nourriture de ses soldats avant d’examiner les généraux et les officiers. Vouloir améliorer la nourriture de ses proches revient au désir d’enrichir leur existence. Cette pratique s’est étendue peu à peu aux dirigeants. Si ce procédé se systématise et devient un réflexe plus ou moins calculé qui s’avère être souvent une mise en scène, Ie peuple peut alors s’en méfier … Le geste ne doit pas être répétitif car convier quelqu’un à sa table paraît un acte sincère. Si Ie partage se veut symbolique parce qu’il confirme l’intimité entre deux individus, il ne peut être mécanique, sinon à force, il perdra son sens. L’art donc de gouverner à travers diverses représentations de Ia nourriture oblige à maîtriser ses propres contradictions. La nourriture, plateforme des relations interpersonnelles, implique une éthique du partage où l’intimité prévaut sur la diplomatie et l’authentique sur l’artifice. Sur ce point, en terme d’expérience du partage dans les vicissitudes d’une relation, les proverbes vietnamiens restent ainsi percutants. On appréhende Ia trahison du persécuté, Ia possibilité qu’il devienne un jour l’oppresseur et invente les pires tyrannies, on clame alors ce proverbe:
– dong hoi dong thuyen (avoir le même festin après avoir eu Ia même barque) évoque à travers l’image de la barque, la solidarité dans les épreuves, les difficultés, éprouvées notamment dans Ia survie. Le festin symbolise Ia réussite, la prospérité ou tout simplement le pouvoir. Les deux representations, une fois associées, font apparaître deux catégories d’individus, les bons, ceux capables de partager autant les épreuves de la misère que les fruits du succès. Puis, les mauvais, les traîtres, ceux qui ne peuvent partager que les pires moments et jamais les avantages de la richesse. On est ainsi exposé à des relations de tous genres, mais on compte en réalité peu d’amis. Dans les moments difficiles, il est bien alors de se souvenir d’une catégorie d’amis:
– nam gai nem mat (se coucher sur les épines, goûter les fruits amers) évoque les heures difficiles communes irnprégnées dans Ia mémoire de la relation amicale.
En changeant de contexte, le verbe an – manger intervient également dans les relations administratives, régies de façon abusive par les mandarins appelés tham – gloutons – pour formuler la critique sociale au temps féodal. A travers les métaphores des animaux qui croissent anormalement avec une nourriture qui ne leur est pas destinée:tam dau tam chang an dau,
tam doi an ruong an trau an bo
(le cocon ne mange plus les feuiles du mûrier,
il réclame Ies champs, les buffles, les vaches).Le cocon évoque l’image d’un insecte à peine conscient qui ne vit que pour manger, pareils aux mandarins, médiateurs du roi avec son peuple, entre le pouvoir royal et l’ordre public qui profitent de leur position afin de pratiquer, sous Ies yeux de tous, la corruption.
Enfin, le verbe an – manger – dans la conversation courante des Vietnamiens signifie aussi prendre, gagner. On se méfie alors des engagements des gouvernements, des promesses des dirigeants car tous ne peuvent échapper à la soif du pouvoir:an lam vua thua lam giac
(quand on gagne on devient roi et quand on perd on devient brigand).Manger et deviner I’environnement de I’imaginaire
L’étude des proverbes, des dictons et des chants populaires révèle les expériences d’un peuple, dans I’organisation de son mode de vie et de sa conception de l’univers. Par les devinettes, ce peuple raconte d’une part sa vision de la nature, sa technique dans les outils, sa maîtrise des objets, qui l’entourent et d’autre part l’amour et le soin quotidien qu’il apporte à cet ensemble. Le verbe an – manger – dans cette perspective déploie toute sa dynamique dans le trésor de la littérature populaire:
– xuong suon xuong song nuot tron nguoi ta
an vo nha ra, nguoi ta van song
(les côtes et Ia colonne vertébrale engloutissent les hommes
elles mangent, recrachent et pourtant les hommes sont toujours vivants),
Ia réponse est: cai nha – une maison.– cay lan tan de an kho treo
(Ia plante qui danse sans arrêt,
facile à manger mais rampe difficilement),
Ia réponse cay lua – le riz.– mat dang co trang phau phau,
an no tam mat ru nhau di nam
(une troupe de hérons blancs
ils ne savent que bien manger et ensuite aller se coucher),
Ia réponse: ro bat – Ia vaisselle.– cay xanh xanh re moc tren canh,
khong nau canh de danh an song
(Ia plante si verte avec ses racines sur les branches
on ne peut en faire une soupe, mais on peut la manger cru),
Ia réponse: cay trau khong – le bétel– cay xanh thi la cung xanh,
an song thi duoc nau canh thi dung
(Ia plante avec le tronc et les feuilles verts
Ia manger cru est possible, mais il est interdit d’en faire une soupe),
la réponse: cay thuoc la – le tabac.L’originalité des devinettes vietnamiennes, dans ces exemples choisis, est de mettre l’accent sur Ia capacité d’observation de la nature en rapport direct avec I’environnement familial au quotidien. Une autre caractéristique est le recours aux matières offertes par Ia nature tropicale, riche pour cuisiner en conservant des saveurs déterminées. Enfin, les ressemblances des plantes, des animaux et des objets usuels forment un monde harmonieux où l’hornme se prête volontiers à créer des confusions afin d’enrichir les devinettes.
Manger et disserter: Ia vicissitudes des saveurs
La plupart des grands écrivains qui contribuent à Ia prose vietnarnienne ont travaillé sur le thème de Ia nourriture. Mais il y a nourriture et nourriture, car le repas quotidien peut aussi devenir un festin. La précision de l’écriture permet de retrouver un goût qui s’est perdu à travers le quotidien. La finesse des mots effleure avec intelligence les odeurs culinaires enfouies pêle-mêle dans la profondeur de la mémoire collective, plus ou moins défaillante. Le pouvoir empirique de l’écrivain sur la gastronomie de son peuple, produit des saveurs qui participent à la formulation d’une identité collective, à la lutte pour la sauvegarde d’une culture sous les feux de la guerre et à la revendication d’une liberté d’expression littéraire. Parmi les plus poètes grands du XXe siècle, Tan Da préconise le retour à la nature en rappelant sans cesse les saveurs des plantes qui composent Ies couleurs et les parfums du pays. L’écrivain Vu Bang nourrit sa littérature nostalgique avec un environnement quotidien urbain complexe des plats et la diffusion de leur saveur dans sa capitale, Ha Noi, après son exil 1954, debut d’une longue guerre civile entre le nord et le sud, qui prit fin en 1975. Le prince de la prose vietnamienne Nguyen Tuan, décrit le pho – la soupe nationale des Vietnamiens – avec une précision qui met en relief la nécessité de préserver l’univers précieux que constituent les saveurs populaires, comme l’intérêt à garder les traditions ancestrales. Et cela, aux moments les plus critiques pour les écrivains du mouvement Nhan-Van contre le totalitarisme du nouveau régime révolutionnaire, pendant la réforme agraire en 1956, dont la répression impitoyable traumatise encore le milieu littéraire. Au sud, l’écrivain Son Nam dépeint un tableau du delta du Mékong, univers familier et lieu de prédilection dans lequel il puise toute son inspiration littéraire. Là, les saisons, les champs, Ies jardins et les êtres baignent dans une harmonie parfaite où s’évanouissent les frontières entre le travail, la nourriture et Ia fête. Sans oublier, Vo Phien le maître de l’essai vietnamien – tuy but, l’improvisation au gré de Ia plume. II conte Ia joie et la tragédie de son peuple grâce aux plats et leurs saveurs. Il poursuit sans repos, en exil aux Etats-Unis, la même littérature dans laquelle les Vietnamiens se retrouvent pour enrichir leur héritage culturel, assumer leur déracinement et raccourcir la distance qui les sépare de la terre de leurs ancêtres. Il est, peut-être, le seul qui a souligné combien les guerres détruisent l’âme vietnamienne. Il comprend cette souffrance à travers I’histoire dune grand-mère qui sans cesse, cuisine sous les bombardements le même plat mam cua – crabe fermenté – devant l’indifférence de ses enfants, qui ne mangent plus un tel plat de nha que – campagnards indéracinables. Avec les exodes successifs de la campagne vers les villes entre 1954 et 1975, les plats suivent les hommes et s’immiscent dans leurs vicissitudes et leur offrent un plaisir, même éphémère, autour d’une table familiale, sous les feux d’une guerre qui n’épargne même plus une effluve culinaire. Dans la littérature de Vo Phien, la volonté de survie d’un Vietnamien suit le destin des plats. Dans l’angoisse commune de disparaître sous le hurlement des fusils, les Vietnamiens du sud accueillent aussi le pho – une soupe originaire du nord – et réservent un accueil extraordinaire au bun bo hue – la soupe du centre du pays. Le gia – germes de soja – mélangé au hu tiu – soupe du sud à base de porc – accompagnent les soldats sudistes jusqu’aux hauts plateaux du centre, proches des minorités ethniques, des montagnards.
Manger et émigrer: Ia gestion des dettes
Quelques anthropologues pessimistes prévoient la disparition prochaine des soupes, des potages au profit des plats compacts sans consistance liquide, commercialement efficaces comme le fast-food. Or, les restaurants vietnamiens en France et aux Etats-Unis réservés aux réfugiés vietnamiens « exploitent » ces soupes comme Ie repère de la gastronomie nationale en exil. Le succès n’a pas été longtemps ignoré des commerçants chinois, installés, massivement à Paris et dans de nombreuses villes des Etats-Unis à forte concentration vietnamienne. La majorité de ces restaurants qui proposent Ies « soupes vietnamiennes » vivent des cuisiniers chinois et de la clientèle vietnamienne. La plupart viennent pour retrouver non seulement l’ambiance des restaurants populaires d’autrefois mais aussi l’impression – certes faussée – des saveurs et des goûts perdus même au pays après tant d’événements. Il est également intéressant d’insister sur le rôle éducatif de Ia nourriture, notamment du verbe an – manger dans l’immigration vietnamienne où le confucianisme régit Ies codes de bonne conduite dans la cellule familiale. Le processus d’intégration de la plupart des Vietnamiens dans la société française peut se résumer par Ia volonté d’éviter les revendications sociales, les conflits politiques, Ia rivalité culturelle avec l’Etat et la population du pays d’accueil:
– an trai nho ke trong cay
(Si on mange le fruit d’un arbre, on portera Ia dette envers celui qui l’a planté).
– an cay nao rao cay nay
(quand on mange un fruit, on protége son arbre).Ces deux proverbes peuvent expliquer l’attitude silencieuse de Ia première génération des parents. Pour un jeune de Ia deuxième génération né en France, l’éducation familiale, depuis sa scolarité jusqu’à son entrée dans ía vie active plus ou moins imposée par les aînés, l’oblige à une double exigence : l’économie permanente contre les dépenses excessives et la volonté d’une réussite scolaire pour préparer la promotion familiale. Les proverbes éducatifs sont encore là dans les activités de Ia famille au quotidien, le plus connu:
– an bua sang lo bua to
(quand on prend le petit déjeuner, on se soucie déjà du dîner).Manger et relativiser: l’exigence relationnelle
En observant l’Inde et ses religions, Louis Dumont note que dans certaines regions, les Indiens mangent dans une position assise, une main prend la nourriture et l’autre reste immobile, inactive et suspendue tout au long du repas. La main qui prend la nourriture touche les choses sacrées, l’autre aux heures de travail ou dans les activités quotidiennes sert à ramasser les ordures, les choses sales et ne peut toucher, ni même frôler Ia nourriture sacrée. La mise en évidence de l’association entre la croyance spirituelle et I’expression corporelle semble parfaite. Mais dans cette Asie immense et divesifiée, Ia recherche de la nourriture est considérée comme un acte difficile de l’existence, car la misère est permanence. Un tel acte se définit comme une épreuve de la maturité humaine, ce qui explique son caractère sacré. Dans Ie nord du Vietnam, l’éducation familiale rappelle qu’il faut avoir toujours Ia meilleure porcelaine pour contenir les mets les plus simples, les légumes et le bouillon par exemple. Au centre du pays à Hue, de la famille royale au « peuple aisé » on apprend à manger d’abord avec les yeux – an bang mat – c’est-à-dire décorer joliment les plats dans Ie souci de respecter la beauté de la nature, avant de les avaler. Plus au sud, les gastronomes doivent prouver leurs connaissances sur la variété impressionnante des légumes appelés parfums rau mui. Ici les végétaux comestibles et leurs parfums enivrants imposent aux « fines bouches » d’apprécier la nourriture, au préalable avec leur odorat. On mange ainsi en humant et non par gourmandise. Quand aux enfants au cours de leur éducation, ils acquièrent certains automatismes: « finir leur bol jusqu’au dernier grain de riz, et ne laisser tomber aucun grain sur la table » tout en apprenant à parler et marcher.
Il arrive que l’individu se comporte différemment et digère autrement son repas, il relativise Ie sens imposant de la nourriture en l’orientant vers une éthique collective, communautaire puis sociale. La nourriture est vitale mais peut devenir source de conflit, d’irrespect entre les humains. Les Vietnamiens disent:lao nhao nhu chao voi com
(mélanger pêle-mêle comme la soupe et Ie riz),le verbe lao nhao contient un sens péjoratif et s’applique aux individus bruyants qui gênent l’harmonie du groupe. Ils peuvent aussi créer des bouleversements, des dégâts au sein de leur communauté et de leur environnement.
Plus concret et significatif, le proverbe:mieng an la mieng toi tan
(le morceau qu’on mange est aussi Ie morceau du déshonneur).
Un autre décrit le sens double de la nourriture, moral et physique:
mieng an qua khau thanh tan
(Une bouchée n’est plus rien une fois avalée).Les individus se focalisant sur la nourriture sont méprisés seIon ce profil:
chen com manh ao
(un bol de riz et un morceau de tissu)
évoque Ie souci matériel d’un individu égoïste. Nguyen Du – le plus grand poète vietnamien du XVIllème siècle – les avait qualifiés comme ceci:nhung phuong gia ao tui com xa gi
(les gens en forme de portemanteau et de sac de riz sont insignifiants).
Outre Ia croyance au sacré et le détachement nécessaire devant certains événements, la nourriture, dans la pratique alimentaire quotidienne comme dans la représentation de l’identité des Vietnamiens apporte trois autres expériences précieuses Ie pragmatisme, l’indulgence et l’exigence relationnelle:kheo an thi no kheo co thi am
(si on mange intelligemment on sera rassasié,
si on contracte intelligemment son corps, on aura chaud).Le pragmatisme ici ne se réalise pas d’une façon systématique, au jour le jour, mais se définit dans le respect de soi-même, de sa dignité au sein d’un groupe.
– Ion bat com nho bo lat
(grand le bol de riz, petite la poignée de cacahuète)évoque la capacité de s’estimer à sa juste valeur. Ce comportement suppose la notion de juste milieu et de tolérance. On mange ce qu’on gagne, on mange juste pour se nourrir et surtout on ne mange que ce qu’on peut donner. C’est-à-dire être capable à tout moment de partager sa part avec celui qui a faim.
-Tieng chao cao hon mam co
(le salut est plus haut que Ie festin)impose à l’individu Ia maîtrise de soi devant la nourriture pour préserver la face. Le respect envers autrui renvoie au contrôle des rites sociaux.
Apprendre à manger a ses raisons que la raison pure n’a pas encore savouré.NOTES:
1.L’incompatibilité entre certains logiciels d’impression n’a pas permis de mettre les accents sur les mots vietnamiens.
2. Entre Ia traduction littérale soucieuse de la description exacte et la traduction littéraire qui tend à la cohésion linguistique du texte, il est souhaitable ici de chercher une troisième voie de traduction pour les mots imagés, notamment pour les plats et les pratiques alimentaires qui font varier Ie verbe an – manger seIon les contextes sociaux. La tâche ne sera pas aisée surtout par rapport à une réflexion dont la signification culturelle reste indissociable de l’interprétation anthropologique. Les difficultés de traduction restent, dans cette perspective, permanentes car chaque culture se développe dans son contexte singulier avec ses coordonnées spatio-ternporelles spécifiques. Dans la culture vietnamienne, Ie verbe an – manger – traduit souvent les vécus complexes des relations sociales entre individus, entre groupes sans être associer avec d’autres verbes. Ainsi seIon les circonstances, ce même verbe an -manger signifie différemment: avaler, absorber, battre, gagner, posséder, approprier… D’un point de vue méthodologique, ce texte aborde Ie thème du rapport entre l’identité culturelle et la nourriture à travers l’analyse de la récurrence du verbe an – manger dans les proverbes et dictons populaires ainsi que dans les expériences littéraires et d’exil des Vietnamiens. La première version de ce texte a été publiée dans la revue Ethnologie française, XXVII, 1997, 1, Pratiques alimentaires et identités culturelles.
3.Les vietnamiens renvoient, selon les contextes de l’interaction ou de la domination, à deux traductions différentes: la première il s’agit de feuilles du banian, et la deuxième gâteau à base de riz réservé aux pauvres.REFERENCES BUBLIOGRAPHIQUES
Dao Duy Anh, Van hoa Viet Nam Su Cuong (La culture vietnamienne), éditions Dong Nam A, Paris, 1985.
Dumont. L, 1996, Homo hierarchicus, Essais sur le système des castes, Paris, Gallimard, rééd. Gallimard. Coll. « Tel », 1979.
Le Huu Khoa, L’immigration asiatique: Economie communautaire et stratégies professionnelles, Fondation des Sciences politiques, Centre des Hautes Etudes de l’Asie et l’Afrique modernes, collection notes africaines, asiatiques et caraïbes, Documentation française, 1996.
Nguyen Van Huyen, Les chants alternés des garçons et des filles en Annam, Librairie Orientaliste Paul Geuthner, 1954.
Phan Ke Binh, Viet Nam phong tuc (coutumes vietnamiennes), Editions Tong Hop Dong Thap, Ho Chi Minh ville, 1990.Passeron. J.C., « De Ia pluralité théorique en sociologie-théorie de la connaissance sociologique et théories sociologique », Revue européenne des sciences sociales, tome XXXII, 1994, N’ 99, pp. 71-116.
Pottier R, Anthropologie du mythe, Kimé, 1995.
Son Nam, Huong rung Ca mau (Parfum de Ia forêt de Ca Mau), éditions Doi Nay.
Vo Phien, Tuy but (essai), Editeurs Van nghe, 1986, Californie, USA. -
28 avril 2007 à 13h11 #34910
merci beaucoup pour ce document tres surprenant.
c’est « comprehensible » de s’appuyer sur sur l’activité de se nourir pour qualifier les relations entre individu puisque c’est ce que l’on peut a voir de plus elementaire a partager mais de la a decliner a ce point le concept;D.
puisque cela est autant ancré dans la langue, il doit aussi y avoir des stigmates dans la vie quotidienne. invite t’on naturelement quelq’un que l’on connait peu ou pas a dejeuner, a diner, chez soi ou au resto slon le caractere precis de la relation en cour (ou envisagée;D) etc…
est il courant dans la langue vietnamienne qu’un verbe en qualfie un autre ou que l’on juxtapose plusieurs verbes pour lui donner un sens precis ou modulé?
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28 avril 2007 à 16h41 #34914
Comme Vnlover je suis surpris par cet article mais pas pour les mêmes raisons…
D’abord le sujet : ăn (manger)
Bien entendu « manger » est une activité importante pour tout être vivant et il n’est pas étonnant que ce terme occupe une grande place dans toutes les langues et pas seulement dans le vietnamien.
Cependant je trouve qu’il y a, sinon un manque d’honnêteté, au moins un manque de rigueur de ne pas rappeler que « ăn » possède des dizaines de sens autres que « manger » ou « se nourrir »On doit trouver entre 600 et 700 expressions qui commence avec « ăn » et dont beaucoup n’ont rien à voir, ni de loin ni de près, avec « manger ». Quelques exemples :
An khớp = bien articulé, bien ajusté
An nói = parler, manière de parler, đe se comporter
An mặc = s’habiller, manière de s’habiller
An năn = se repentirIl y a d’autres termes qui signifient aussi « manger » : « xài », « xơi » (manger ou boire) ou même « thực » qui n’y sont pas évoqués, et pour cause…
Deuxième sujet d’étonnement : la traduction des proverbes vietnamiens, pour le moins médiocre, sont parfois à contresens et souvent parfaitement abscons :
Citation:
nhung phuong gia ao tui com xa gi
(les gens en forme de portemanteau et de sac de riz sont insignifiants).:suspect:
Les gens incapables et inutiles ne comptent pas (sont sans importance)
Citation:
muon an thi lan vo bep
(celui qui souhaite manger doit rouler son corps rapidement vers la cuisine)
Qui veut manger doit se précipiter à la cuisine
Nota : Le verbe « lăn » n’a pas que le sens de « rouler » et peut aussi signifier « se déplacer vivement », « se lancer dans la mêlée » …
Citation:
mieng doi dau goi phai bo
(quand la bouche a faim, les genoux savent glisser).
La faim fait ramperIl y a tant d’autres…
Troisième sujet : Des explications erronées desdits proverbes
Citation :
… Le proverbe suivant, s’affirmant comme critique sociale, enseigne aux individus et aux familles la considération d’une éthique des vivants face à une pratique excessive du respect des ancêtres:song thi chang cho an nao
chet thi cung gio mam cao co day
(pourquoi ne pas laisser manger les personnes en vie
et pourquoi vénérer les morts avec des plats débordant de nourriture).Cette critique peut à tout moment prendre une tournure agressive envers Ies personnes qui ne pensent qu’aux disparus et négligent les vivants. L’individu doit organiser son quotidien sur deux modes temporels indissociables tant Ie passé que le présent. On vénère les disparus mais on s’occupe aussi de ses proches encore en vie:
song thi con chang cho an
chet thi soi thit lam van te ruoi
(Pas de nourriture quand on est en vie,
quand on est mort, Ie riz et Ia viande vénèrent inlassablement les mouches).D’abord une traduction correcte :
Sống thì chẳng cho ăn nào
Chết thì cúng, giỗ mâm cao, cỗ đầy
De leur vivant, on ne leur donne pas à manger
Morts, on fête les anniversaires de leurs morts avec force victuaillesSống thì cơm chẳng cho ăn,
chết thì xôi thịt làm văn tế ruồi
De leur vivant, on ne leur donne pas à manger
A leur mort, riz et viandes servent d’offrandes aux mouchesLà on comprend le vrai sens de ces proverbes : Il faut s’occuper des gens de leur vivant, morts cela leur importe peu que vous leur donniez de belles fêtes.
Quatrième sujet : Explications fantaisistes d’expressions pourtant populaires :
Concernant lưng dài (dos long)
Citation :
L’image d’un dos long qui désigne les hommes qui abusent des plaisirs de la vie est renforcée par le proverbe suivant: cho sung rung décrit les individus qui attendent que les figues leur tombent droit dans la bouche ou encore que les figues leur tombent du ciel.Cet expression provient de « đấng nam nhi lưng dài vai rộng » (l’homme a le dos long et les épaules larges) qui signifie simplement que l’homme est plus grand et plus fort physiquement que la femme.
Citation:
– an tuoi nuot song (manger-frais, avaler tout cru) rassemble les individus gourmands. Sans aucune maîtrise de soi dans leur socialisation, is manquent notammemt de respect envers autrui et nuisent ainsi à la collectivité par leur brutalité et leur agressivité.Juste un commentaire : archi faux !
Rien que cette phrase qui comporte à la fois une mauvaise traduction suivie d’une mauvaise explication
Citation :
Dans les moments difficiles, il est bien alors de se souvenir d’une catégorie d’amis:
– nam gai nem mat (se coucher sur les épines, goûter les fruits amers) évoque les heures difficiles communes imprégnées dans la mémoire de la relation amicale.Dénote une méconnaissance et de la littérature et des histoires classiques du Vietnam…
J’ai aussi l’impression que l’auteur n’a pas fait relire son texte par un correcteur professionnel ni même par un simple francophone parce qu’on trouve des phrases quelque peu bizarres comme :
Le cocon évoque l’image d’un insecte…(le ver à soie)
Le pouvoir empirique de l’écrivain sur la gastronomie de son peuple
Il arrive que l’individu se comporte différemment et digère autrement son repas
Ils ne savent pas reculer et calculent aveuglément
…
Sur le fond je trouve beaucoup de digressions comme par exemple dans le chapitre « Manger et gouverner: les écarts du pouvoir » où il n’est sujet que d’Histoire sans rapport aucun avec le sujet de l’article et où l’on profite pour faire de la sempiternelle autosatisfaction en glissant la phrase :
Citation :
Un tel coup de théâtre reste Ie facteur décisif dans Ie champ militaire pour un peuple considéré comme le faible luttant contre Ie fort, les Chinois, les Japonais, les Français et les Américains.Je peux vous sembler sévère mais je crois qu’il le faut, s’agissant du texte d’un enseignant…
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28 avril 2007 à 19h14 #34919
Cher Leon,
Comme notre nouvel ami Quarteron44, je suis bluffé par votre savoir aussi large et varié. Vos remarques sur ce long article du Pr Le Huu Khoa sont très justes et très pertinentes. je suis stupéfait par ce manque de maîtrise de la langue Française de la part d’un enseignant universitaire en France.
Etonnant!Amitiés à tout le forum
Uthung -
4 mai 2007 à 22h17 #35075
Merci pour les infos..
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