Comparé aux plans contre la crise, éradiquer la malnutrition ne coûterait presque rien
LEMONDE.FR | 16.10.08 | 19h37
a Journée mondiale de l'alimentation est l'occasion pour les ONG et les institutions internationales de rappeler les montants nécessaires pour éradiquer la faim dans le monde. Mot d'ordre cette année : mettre fin à la malnutrition ne coûterait quasiment rien comparé aux sommes investies par les pays riches face à la crise financière.
22,2 MILLIARDS D'EUROS POUR ÉRADIQUER LA FAIM
La FAO, l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et pour l'agriculture, compte 925 millions de malnutris à travers la planète, soit 75 millions de plus qu'avant la crise alimentaire du printemps dernier. Elle demande 30 milliards de dollars (22,2 milliards d'euros) par an pour mettre fin durablement au problème de la malnutrition. Cet argent doit servir pour les deux tiers à améliorer la productivité de l'agriculture dans les pays touchés. Il faut notamment améliorer les infrastructures pour assurer un meilleur accès au marché pour les producteurs isolés et assurer la préservation des ressources naturelles avec des technologies adéquates. Le tiers restant devrait être consacré à l'aide alimentaire directe.
Lors de la conférence de juin sur la crise alimentaire mondiale, les chef d'états présents s'étaient engagés à donner 12,3 milliards de dollars. Seul un milliard a été versé pour l'instant.
3 MILLIARDS D'EUROS POUR SOIGNER 19 MILLIONS D'ENFANTS
Pour Action contre la faim, entre 1,5 et 3 milliards d'euros par an permettraient de traiter toutes les personnes touchées par la malnutrition aigüe sévère, dernier stade avant la mort. Les victimes sont avant tout des enfants de moins de cinq ans, 19 millions seraient concernés à travers le monde. Cet argent servirait à financer l'organisation des soins et l'achat des produits thérapeutiques. C'est le "plumpy nut", une sorte de beurre de cacahuète hypernourissant, qui est majoritairement utilisé. Pour l'instant, il est surtout produit en France, mais l'objectif est de le fabriquer au plus près des zones en besoin, ce qui réduira encore les coûts. Action contre la faim dépense en moyenne 38 euros pour sauver un enfant dans les pays où l'association est présente, mais les coûts logistiques varient énormément selon les pays.
OUVRIR LES MARCHÉS AUX PRODUITS DES PAYS PAUVRES
L'ONG Oxfam publie, jeudi, un
rapport détaillé sur le prix des produits alimentaires. Le document préconise dix solutions à faible coût. Selon ce rapport, la hausse des cours cette année, en plus d'augmenter les difficultés pour les consommateurs les plus pauvres, n'aurait pas profité aux petits producteurs, mais seulement aux grands groupes de l'agroalimentaire. Oxfam souhaite surtout un changement des réglementations du marché des produits agricoles. Les pays riches devraient ouvrir leurs marchés aux produits issus des pays pauvres, tout en autorisant ceux-ci à protéger leur agriculture de la concurrence. L'ONG regrette que l'aide à l'agriculture soit devenue le parent pauvre de l'aide au développement depuis les années 80, passant de 18 % à 4 % de l'ensemble des aides publiques. Elle réclame le déblocage de 25 à 40 milliards d'euros.
Jean-Baptiste Chastand