"Agent orange" au Vietnam : Monsanto condamné Le Monde.fr avec AFP | 12.07.2013 à 13h30 • Mis à jour le 12.07.2013 à 14h56
La justice sud-coréenne a donné raison, vendredi 12 juillet, à 39 vétérans affirmant être tombés malades à cause de l'"agent orange", un défoliant utilisé par les Américains pendant la guerre du Vietnam. La Cour suprême estime prouvée la corrélation épidémiologique entre cet herbicide et les maladies de peau développées par ces anciens militaires qui ont combattu aux côtés des Américains contre le Vietcong. Elle a ordonné à Monsanto et
Dow Chemicals, productrices de l'"agent orange", de leur
verser au total 466 millions de wons (environ 315 000 euros), des réparations qu'ils ne recevront sans doute jamais.
Un total de 16 000 vétérans avaient saisi la justice individuellement en 1999 contre les firmes américaines, réclamant l'équivalent de 3,4 milliards d'euros de dommages financiers.
Dow Chemicals a immédiatement fait
savoir qu'elle contestait les conclusions de la justice sud-coréenne et invoqué des décisions précédentes aux Etats-Unis. La Cour suprême sud-coréenne a, en revanche, infirmé une décision d'appel faisant droit aux demandes de milliers de vétérans supplémentaires.
TROIS MILLIONS DE VIETNAMIENS EXPOSÉS
Entre 1961 et 1971, Monsanto produit l'agent orange, constitué à
partir de l'herbicide 2,4,5-T, dont la dangerosité est largement connue depuis l'explosion de l'usine de Nitro. Ce défoliant sera massivement déversé par l'aviation américaine au-dessus des forêts vietnamiennes pendant la guerre. Les conséquences se font
encore sentir aujourd'hui, avec de nombreux cancers et des malformations de naissance au Vietnam, ainsi que des séquelles diverses chez nombre d'anciens combattants américains.
Dans les années 1970, des
vétérans du Vietnam ouvrent une Class Action contre les producteurs de l'agent orange. Monsanto se retrouve, au côté de six autres
entreprises, accusé principal d'un
procès en réparation pour empoisonnement. En 1987, les sept producteurs de l'agent orange sont condamnés à
verser 180 millions de dollars à un fonds de compensation destiné aux soldats américains.
Durant le procès, Monsanto présentera des études scientifiques démontrant l'absence de lien entre l'exposition à la dioxine et les nombreux cancers dont souffraient les vétérans, pour les débouter de leur action. Il sera démontré au début des années 1990 que ces études se fondant sur les conséquences de l'explosion de l'usine de Nitro en 1949
étaient biaisées.
Cette fraude scientifique sera confirmée par le
National Research Council, qui constate que les études de Monsanto
"souffraient d'erreurs de classification entre les personnes exposées et non exposées à la dioxine, et qu'elles avaient été biaisées dans le but d'obtenir l'effet recherché". L'affaire sera relatée en 1990 par Greenpeace et le chercheur Joe Thornton dans un rapport intitulé
Science for Sale.