Il y a là justement une particularité du peuple Vietnamien: avec les cercles confucéens d'une part (et donc le soutien sans jugement des membres de cercles familiaux proches), et avec la règle du consensus apportée par le communisme, on a un fonctionnement social assez unique.Envoyé par Son Lam
Autant il y a une très forte pression pour que chacun accepte le degré de mise en commun nécessaire à ne pas présenter de menace dans une société méfiante (ouverture sans sentiment à l'autocritique, perte de vie privée voire d'intimité vis-a-vis des voisins ou du responsable du quartier, devoir absolu d'écoute de l'autre, et jusqu'aux marques de familiarité formelle avec des inconnus même antipathiques*), ce qui tend à élargir artificiellement le cercle proximal;
*antipathique? Qu'est-ce que c'est?
Autant une fois qu'on respecte ces règles, il n'y a plus de pression, plus de jugement, et un "laxisme" envers tout un chacun qui peut être dérangeant. Quand on considère le degré de promiscuité et le peu d'attention que les uns portent aux autres (un Tel se lève à 2h du mat', allume la lumière et la télé alors que tout le monde essaie de dormir dans la pièce, etc. etc.), il y aurait de quoi rendre fou un occidental. Mais alors, fou furieux.
Ca mène à un comportement social délicat, voire à terme dangereux.
Pour recycler l'argent des cours, des écoles font semblant d'enseigner? Les papas se moquent de leurs enfants "il a le bac mais il ne sait pas lire, demandez-lui donc de lire!" (sic). Mais réformer l'école? Pas un geste.
Ma femme me disait qu'une dame dans le bus lui racontait tout simplement l'autre jour qu'elle devait de nouveau subvenir aux besoins de son fils, parce qu'il est drogué comprenez-vous. Presque joyeuse. Il bricole, mais ca ne suffit pas. Aucun jugement. Aucune mise en perspective.
On a mis en examen la femme d'un ami, à propos de malversations financières. Elle était chef financière dans une banque. Mais autant elle a été administrativement attaquée, autant personne ne lui reproche rien ni ne la juge.
En 2000, une femme de Vĩnh Long a été arrêtée pour avoir détourné 64 millions de dollars. (soixante quatre millions) Son fils allait à la maternelle dans sa propre Rolls-Royce violette. C'est bien que personne ne regardait ni ne jugeait.
L'affaire de PMU18, avec un Bùi Tiến Dũng qui claque des millions de dollars en paris sur le foot ($2,000,000 si je me rappelle bien), et qui convecte une masse de blé impressionnante au-travers des ministères poreux, sans que personne ne s'inquiète. Tous coupables, pas de coupable: c'est la fameuse pression à la conformité.
On a appris à regarder ses pieds et pas les autres en face.
On a appris à redouter ceux qui parlent fort.
Et surtout, on ne discute pas, on ne remet pas en question.
Gérons le présent, l'avenir c'est pour plus tard.
Là òu je veux en venir est que c'est le même laisser-aller, le même désintérêt des affaires de la maison (l'"économie") ou de la ville (la "politique") que ceux qu'on voit en occident aujourd'hui, et en particulier aux USA. Quand on ne juge pas ou qu'on respecte les plus forts quels que soient les moyens qu'ils prennent, on se met sur des rails en pente.
Les mêmes rails qui mènent Bush au pouvoir sans avoir été élu (On triche pour passer. On gagne? C'est qu'on est le meilleur!); qui lui font faire une guerre dont personne (même son peuple, à une grande majorité*) ne voulait --et qui met énormément d'argent dans ses poches et dans celles de ses meilleurs amis industriels, tant pétroliers que militaires au prix de vies humaines.
L'American Dream, qui fait que chacun se concentre sur son petit monde pour prospérer --quels que soient les moyens--, on le retrouve à l'échelle vietnamienne aujourd'hui, et s'il apporte un confort matériel inusité, il traine avec lui le spectre du dérapage général.
Une fois de plus, l'individualisme, que ce soit en tant que doctrine (USA) ou par défaut de pression de groupe (Vietnam), côute très cher à la société en tant que groupe.
* avant l'offensive: être contre la guerre après, quand c'est vos enfants qui y meurent, c'est une trahison.