J'ai découvert sur internet ce texte, que je voudrais partager avec vous:
Itinéraire d'une âme
(http://litterature3.free.fr/memoires.htm)
Du bout du monde
Je suis né en 1955, dans un pays qui a deux belles saisons, la saison sèche et la saison des pluies. J'y ai vécu toute ma jeunesse jalonnée de merveilleux moments qui compensaient les périodes néfastes. Ma mère et mon frère partageaient avec moi le bonheur que nous procuraient la nature et les gens par leur simplicité. C'était le Vietnam. Un pays déchiré par trente années de guerres fratricides et inutiles que j'ai quitté avec regret et duquel de temps en temps j'ai la nostalgie. Ma famille a vécu toute la durée de la guerre du Vietnam, mais Dieu merci, nous avons eu beaucoup de chance d'en être épargnés. Cependant, les répercussions de la guerre ont nui à la mentalité des gens ayant la propension aux troubles et à la délinquance. Ce qui nous rendait la vie bien difficile en leur compagnie.
D'origine vietnamienne, ma mère fuyait les bombardements français en quittant Hanoi et s'est établie au sud du pays. Mon père, français, était marié lorsqu'il courtisait ma mère pendant son séjour durant une période de la guerre d'Indochine. C'était un militaire de carrière qui exerçait la profession de chef comptable dans l'armée française. A ma naissance, ma mère avait préféré que je sois nationalisé vietnamien tandis que mon père avait choisi plutôt la nationalité française. Fort heureusement, ils avaient fini par faire le bon choix. Car pendant la guerre du vietnam, la plupart de jeunes appelés vietnamiens n'en sont pas revenus, malgré l'aide en entraînements et en matériels des américains.
Elevé dans une famille athée, je n'avais jamais entendu parler de l'existence d'un Dieu créateur. Le bouddhisme était la plus importante religion du pays mais pour moi, mal informé, c'était simplement une sorte de secte, même si je ne savais pas exactement la signification de ce mot, que je regardais avec indifférence. Les temples, les cérémonies, les prières, les coutumes religieuses, les moines bouddhistes, etc., tout cela ne m'avait jamais attiré durant ma jeunesse, jusqu'au jour où Dieu a touché mon coeur, mais par la rencontre d'une autre religion : le christianisme
Mon père était un coureur de jupons. Ma mère me portait dans ses bras et m'accompagnait parfois lui rendre visite à son bureau après l'avoir signalé au préalable. Mais un jour, par hasard, elle avait envie de m'emmener le voir. Arrivés à son bureau, il était absent. Elle a posé la question à son secrétaire et celui-ci lui a déclaré qu'il avait fait une brève apparition la veille au matin et s'était absenté toute la journée, et ce matin même, il n'était pas encore arrivé. Ma mère a fini par le soupçonner d'infidélité. Il l'a baratinée par la suite en disant que c'était pour cause professionnelle.
"Coco" était le surnom que mon père m'a donné. Je n'avais pas de nom vietnamien. Mon petit frère était surnommé "le petit". Je ne savais pas que j'étais un si mignon petit bonhomme et cela m'a fait drôlement plaisir quand j'ai vu des photographies de mon enfance, au cas ou le lecteur aimerait connaître mon portrait que je ne peux pas afficher sur le site faute de moyens.
Mon père devait nous quitter pour rentrer au pays après la guerre, j'avais deux ans et mon frère était encore un petit nourrisson. Il a avoué à maman avant de partir qu'il voyait en effet une femme durant ses heures de bureau. Ma mère se retrouva seule, sans profession, pour élever ses enfants. La vie en Indochine à l’époque ne semblait pas trop difficile pour elle qui a pu se débrouiller pour nous en sortir malgré tout.
Mon père était parti en emmenant avec lui tout ce qu'ils avaient acquis tous les deux dans la restauration, c'est-à-dire le maximum. "Il ne vous restera plus qu'à me rejoindre le moment venu", disait-il. Il fera tout son possible pour que nous nous retrouvions à Paris une fois qu'il y sera installé. Il était donc inutile de laisser nos biens au Vietnam. Il inventera un prétexte professionnel à sa femme !... Ma mère, jeune et naïve, lui faisait confiance.
Par la suite, il nous a envoyé une première lettre pour nous annoncer qu'il ne pouvait, compte tenu des circonstances, nous recevoir dans l'immédiat. Et le temps passait, des mois, puis des années. "Il nous faudra patienter", disait-il dans ses lettres. Mais une patience qui durera toujours jusqu'au jour où nous ne recevions plus aucune nouvelle de lui. Il nous parlait de nous envoyer des jouets ainsi que des fonds pour aider ma mère à élever leurs deux garçons en attendant. Des promesses qui ne se sont jamais réalisées. Ma mère trouva un emploi de serveuse dans un restaurant français par la suite pour subvenir à nos besoins. De l'état de patronne de deux domestiques, elle était devenue en peu de temps une simple employée. Mais son salaire nous permettait de garder l'une des deux domestiques qui nous était très attachée.
Ne sachant pas lire ni écrire le français, ma mère confiait la traduction de sa correspondance à une institutrice, mademoiselle Hoa. Celle-ci nous donnait, à mon frère et moi, des cours supplémentaires à domicile pendant les vacances. Mademoiselle Hoa était une petite jeune femme rondelette et gentille. Entre elle et moi, tout se passait bien, sauf un fait marquant, plus amusant que fâcheux, est venu un jour jeter un peu d'ombre dans notre relation. Cela m'est resté gravé dans la mémoire pour toujours. Je ne sais pas si c'était un courant d'air ou une allergie, elle s'est mise à éternuer brusquement alors qu'elle m'expliquait quelque chose, les yeux fixés sur mon cahier, assise en face de moi. Je recevais une giclée de salive en pleine figure. Et elle continuait ses leçons comme s'il ne s'était rien passé. J'avais un respect craintif de mademoiselle Hoa. Je n'ai osé me plaindre de ce mépris qu'à ma mère en espérant qu'elle en tenait compte et qu'elle en restait là. Mais elle lui a fait la remarque au cours suivant devant moi, je me sentais lâche et ridicule ; elle s'est excusée mais ne se sentait pas moins gênée devant ma mère.
J'ai commencé à prendre conscience de ce qu'était la souffrance vers l'âge de 10 ans, mais comparé aux autres enfants dans les pays pauvres, je n'avais pas à me plaindre, loin s'en faut. Mes épreuves s'intensifiaient peu à peu au fil des années à mesure que je grandissais...
Ainsi va la vie...............
J'ai modifié ton titre pour une meilleure lisibilité.
Mike