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Les Japonais s'emparent de l'Indochine
Histoire du Viêt-nam:
Genèse d'un peuple
18 février 1859: la France occupe Saigon
21 décembre 1873: Francis Garnier victime des «Pavillons noirs»
9 juin 1885: le Viêt-nam devient français
9 mars 1945: les Japonais s'emparent de l'Indochine
19 décembre 1946: première guerre d'Indochine
3 février 1954: début du siège de Diên Biên Phu
21 juillet 1954: accords de Genève
29 juin 1966: premiers raids US sur Hanoï
30 avril 1975: capitulation du Sud-Vietnam
Le 9 mars 1945, les Japonais attaquent les garnisons françaises d'Indochine. Ils portent ainsi un coup fatal à la présence coloniale de la France dans le Sud-Est asiatique.
Eviction progressive de la France
Dès le 19 juin 1940, les Japonais en guerre contre la Chine ont profité de la défaite de la France face à Hitler pour exiger de celle-ci qu'elle ferme la frontière entre le Tonkin (le Viêt-nam du nord) et la Chine. Ils ont aussi exigé de contrôler eux-mêmes le chemin de fer qui permet d'approvisionner la province chinoise du Yunnan à partir du portvietnamien de Haïphong.
Le général Catroux, gouverneur de l'Indochine, ne voit pas d'autre solution que de s'incliner. Il est désavoué par le maréchal Pétain et remplacé par l'amiral Jean Decoux. Celui-ci conclut en définitive un accord avec les Japonais le 30 août 1940. À ce moment-là, seule l'Angleterre résiste encore à l'Allemagne et la Chine au Japon.
Le 25 septembre 1940, 25.000 Japonais soumettent les troupes françaises d'Indochine, réduites à 12.000 hommes dont 3.000 Européens. Ils s'implantent en Indochine en laissant en place l'administration coloniale.
Vers le chaos
En 1945, les Japonais sont repoussés de partout par la contre-offensive américaine. À l'approche du dénouement final, le gouvernement de Tokyo décide de préparer un réduit terrestre en Indochine.
Le 9 mars, les troupes japonaises attaquent avec brutalité les garnisons françaises encore présentes sur place. On compte pas moins de 2.650 morts parmi les Français, dont le général Émile Lemonnier commandant de la 13e brigade de Langson. Le général a refusé à deux reprises de signer une capitulation sans conditions. Il est décapité au sabre le 10 mars (à Paris, l'avenue située entre le Louvre et les Tuileries honore sa mémoire).
3.000 prisonniers rejoignent les camps de la mort, dont celui de Hoa-Binh. Parmi les 19.000 civils français, 3.000 sont aussi internés et parfois torturés.
Bao-Daï, empereur d'Annam (le Viêt-nam central), dénonce le protectorat français et se rallie à la «Grande Asie» que promeut le Japon. À quelques mois de l'effondrement militaire de ce dernier, la décision manque de discernement.
Bao-Daï (on écrit aussi Bao Dai) est peu après évincé par le leader communiste-nationaliste Hô Chi Minh, qui soulève la population contre la tutelle japonaise le 10 août 1945. Il abdique le 2 septembre 1945 et la ligue Vietminh, fondée par Hô Chi Minh, proclame l'indépendance de la République démocratique du Viêt-nam (on écrit aussi Vietnam).
Tentative de reconquête française
Cependant que le Viêt-nam s'oriente vers l'indépendance, à Paris, le général Charles de Gaulle, qui dirige le gouvernement provisoire de la République française, met tout en oeuvre pour restaurer la souveraineté de la France sur ses colonies d'outre-mer. Il veut effacer le souvenir de la défaite de 1940 et restaurer en tous lieux la grandeur de la France. Il veut aussi couper court à d'autres tentatives indépendantistes au sein de l'Empire colonial.
Dès le 24 mars 1945, alors qu'il s'apprête à prendre le pouvoir en France à la faveur de la Libération du pays par les Anglo-Saxons, le général de Gaulle déclare son intention de restaurer l'autorité de la France en Indochine dans le cadre d'une fédération de colonies et de protectorats qui comprendrait les trois provinces du Viêt-nam (les trois Ky; Tonkin, Annam et Cochinchine) ainsi que le Cambodge et le Laos.
«De Gaulle, qui entend rétablir la France dans toutes ses positions d'avant guerre, envoie un corps expéditionnaire afin de reconquérir l'Indochine; entreprise difficile à mener à douze mille kilomètres de distance» écrit l'historien René Rémond (*).
Des soldats français s'emparent le 23 septembre de Saigon, capitale de la Cochinchine (le Viêt-nam du sud) en attendant l'arrivée quelques jours plus tard d'un corps expéditionnaire sous les ordres du général Leclerc de Hauteclocque, héros de la Libération.
«Deux politiques sont concevables, sinon pareillement praticables: restaurer par tous les moyens, les armes si nécessaire, la domination française ou rechercher un accord avec les nationalistes par la négociation. Ces deux politiques sont personnifiées par deux hommes également investis de grandes responsabilités: l'amiral d'Argenlieu incarne la première; la seconde revient au général Leclerc, qui s'est vite convaincu de l'impossibilité d'une reconquête militaire et qui préconise la recherche d'une entente - Jean Sainteny en est l'exécutant convaincu» écrit encore René Rémond (*).
Tandis que l'amiral Thierry d'Argenlieu, que le général a nommé gouverneur général de l'Indochine, songe à une restauration pure et simple du protectorat, le général Leclerc, en charge des affaires militaires, revient en France avec la conviction qu'il est urgent de négocier et qu'il faut se résigner à la décolonisation.