La guerre du Vietnam : au pays des leçons mal apprises
Zbigniev Brezinski, ce vieux routier de la politique américaine, qualifie la guerre au Vietnam de la « plus grande aventure des « États-Unis sur l’échiquier international ». Ce conflit militaire, l’un des plus grands du second 20e siècle, a emporté presque 4 millions de vies humaines. Il s’est terminé il y a quarante ans, le 27 janvier 1973 avec la signature à Paris d’un accord de cessez-le-feu.
C’est dans les années 50 du dernier siècle que les États-Unis ont décidé de s’impliquer dans l’Indochine, après la défaite définitive subie par la France dans ses colonies. Les politiciens de Washington qu’il fallait contrebalancer la Chine communiste en pleine expansion. Dans ce contexte, les États-Unis ont refusé de signer accords de Genève de 1954 qui prévoyaient le cessez-le-feu au Vietnam, Laos et Cambodge et la démilitarisation de ces pays. Ils se sont au contraire employés à soutenir à fond le gouvernement du Vietnam du Sud contre le Vietnam du Nord communiste.
De fil à aiguille, ce soutien moral et financier s’est mué en 1964 en une intervention militaire à grande échelle. Au plus fort de la guerre, l’armée américaine engagée au Vietnam du Sud comptait plus de 500 000 soldats. Mais cette aventure s’est soldée par un échec cuisant malgré une supériorité numérique écrasante et un recours massif à l’aviation.
Notons cependant pour faire juste que Hanoï n’est pas resté seul non plus, il recevait une aide massive soviétique et chinoise en armements et conseillers militaires. Il n’en reste pas moins que l’échec subi par la superpuissance dans la guerre contre un petit pays était un événement emblématique. La conclusion principale que devaient en tirer les Américains et tous les observateurs était qu’il est possible de vaincre un régime mais qu’il est impossible de vaincre un peuple, souligne Pavel Zolotarev, président du Fonds de soutien des réformes militaires.
« La guerre froide » opposait toujours l’Union Soviétique aux États-Unis mais prenait la forme de conflits militaires en périphérie ou les intérêts du camp socialiste et des États-Unis entraient en collision. Les leçons de ce conflit sont toujours d’actualité. Il a montré qu’on ne peut pas vaincre le peuple qui s’est choisi le régime politique qu’il considère comme optimal. On peut se rendre maître du territoire et le contrôle mais il faudra finalement se retirer. C’est exactement ce qui se passe en Afghanistan et Irak. Je pense que le résultat sera le même en cas d’intervention en Syrie.
Cette guerre était extrêmement impopulaire aux États-Unis eux-mêmes et pour cause puisque les Américains ont perdu près de 60 000 soldats en tués, portés disparus et morts à la suite de leurs blessures. Mais c’est dans la période d’après-guerre que se situent les plus lourdes perdes. En effet, entre 100 et 150 000 anciens combattants se sont suicidés. Dans ces conditions, l’accord de paix était la meilleure solution tant pour Hanoï que pour Washington, estime le professeur de l’Université de Hanoï Fam Kuang Minh.
L’accord de cessez-le-feu et de rétablissement de la paix au Vietnam signé le 27 janvier 1973 à Paris avait une importance énorme à la fois pour le Vietnam, les États-Unis et le monde entier. Pour le Vietnam, il signifiait la cessation de l’intervention, le retrait des troupes étrangères et la création des conditions pour la réunification du pays. Pour les États-Unis, les accords de Paris permettaient de sortir d’une guerre impopulaire et ruineuse tout au sauvant la face devant les alliés.
La guerre du Vietnam est devenue la plus sanglante au 20e siècle après la Seconde guerre mondiale. Sa fin a marqué le commencement d’une nouvelle étape des relations internationales, celle de détente et de normalisation des relations américano-chinoises et américano-soviétiques. Pourtant, il serait exagéré de dire que les États-Unis ont tiré les leçons qui s’imposaient de cette histoire tragique à ceci qu’après Afghanistan et Irak Washington préfère faire la guerre par procuration.
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