"Je considère la médecine comme un sacerdoce", écrivait le Docteur Yersin à sa mère.
" Voilà déjà un indice mais il ne suffit pas à expliquer pourquoi, aujourd'hui encore, au Vietnam, des rues, des boulevards ou parcs portent le nom d'un agent de l'ancienne puissance coloniale. Injustement méconnu des Français, Alexandre Yersin (1863-1943) est un héros pour les Vietnamiens, certains allant jusqu'à le vénérer.
Quel destin singulier que celui de ce médecin d'origine suisse qui, en 1894, a découvert, en Chine, le bacille de la peste et commencé à mettre au point un vaccin ! Cette victoire sur la maladie la plus terrifiante au monde depuis des siècles aurait pu transformer la vie d'un autre. Elle n'a guère modifié celle de Yersin. Cet homme a rarement laissé à qui que ce soit le soin d'influencer ses choix. Jeune dipômé à Paris, il entre à l'Institut Pasteur nouvellement fondé. Louis Pasteur, en personne, l'adoube. Il est promis au plus bel avenir de chercheur. Mais il décide soudain de partir à l'aventure, s'engageant comme simple médecin de bord sur les navires des messageries maritimes assurant les lignes coloniales. En Indochine, il se fait explorateur, géographe, ethnologue, cartographe et même météorologue.
Après avoir intégré le service de santé de l'administration française, il installe, à Nha Trang, une antenne de l'Institut Pasteur. C'est ainsi qu'il sera chargé d'aller à Canton et Hongkong observer une épidémie de peste qui menace le Tonkin (nord du Vietnam). De retour à Nha trang, il n'a de cesse de développer les activités autour de "son" Institut afin de rendre celui-ci financièrement autonome et de fournir un maximum d'aide à la population locale. Une plantation d'hévéas lui permettra de vendre du caoutchouc à Michelin au tout début de l'industrie automobile. Il met notamment l'accent sur l'éducation et la formation des Vietnamiens. Chargé de créer une école de médecine à Hanoï, les autorités françaises le désavouent, lui reprochant de trop en faire et de favoriser l'éclosion d'une élite cultivée qui pourrait devenir insoumise.
Ce documentaire a le mérite de donner largement la parole aux Vietnamiens mais pèche un peu par naïveté. Il ne montre pas assez le contexte de l'exploitation coloniale qui mettrait davantage en valeur la différence et l'admirable humanisme d'Alexandre Yersin."
Néanmoins passionnant. "
[ Francis Cornu - Le Monde :TV & Radio]