Tu n'as pas compris ma question de philo, car tu es victime d'anthropocentrisme
[*]. Ne t'inquiète pas, c'est une névrose très courante, et c'est réversible. C'est ce qui pousse les Hommes à tout observer, analyser, comprendre, en se prenant eux-même comme point de référence, plutôt que de considérer éventuellement une référence globale ou absolue. Pour donner un exemple (mauvais exemple car simplificateur à l'extrême), l'homme se considère supérieur car il comprend que 2+2=4. S'il arrive à enseigner cela à un singe, il considèrera ce singe comme "plus intelligent" qu'un autre singe qui n'arrive pas à faire cette opération. Et évidemment, il trouvera ce singe plus intelligent qu'un géranium. En revanche, il n'imaginera pas à quel point il peut être inutile pour un géranium (idem pour un singe) de savoir que 2+2=4, et que par conséquent ce dernier n'a aucune raison de posséder cette faculté. En revanche, le géranium sait faire la photosynthèse, chose dont l'Homme est parfaitement incapable (et de toute façon il s'en fout). Un virus, petit organisme de rien du tout, est capable de pénétrer insidieusement dans l'Homme, de se développer à grande vitesse sans qu'il s'en aperçoive, de modifier son ADN (mutation) d'une année à l'autre... et éventuellement de tuer un Homme. Tu te moques de mon exemple de l'arbre, mais en attendant on coupe des arbres qui sont capable de vivre plusieurs fois la durée de vie d'un Homme.
Tu évoques un problème d'éthique.
L'instinct de survie est une chose qui est commune à absolument tous les êtres vivants. Et pour cause, sinon ils ne vivraient pas. Ce qu'on appelle "désir" n'est au fond qu'une variante de ce même instinct... ensuite à chaque espèce son raffinement. Les Hommes, ils désirent, ils pensent, soit. N'as tu jamais vu une plante développer une racine spécialement longue en direction d'un point d'eau? N'as-tu pas entendu parler de ces acacias capable lorsqu'ils sont broutés de "prévenir" les acacias situés en périphérie afin qu'ils sécrètent un poison mortel?
Alors où doit-on placer la référence pour déterminer la valeur d'un être vivant? Ce serait la faculté de penser? Et pourquoi donc? Ce n'est qu'une faculté parmi tant d'autres, et il n'est écrit nulle part que c'est la faculté la plus "noble" de la Création. Il est vrai que si c'était effectivement la faculté la plus noble, ça nous arrangerait bien, nous les Hommes... alors on y croit dur comme fer.
Bref, tout ça pour dire que considérer que certains êtres vivants ont davantage le droit à la vie que d'autre, ce n'est que le résultat d'une réflexion concentrique (anthropocentrique, en ce qui nous concerne) basée sur une classification parfaitement arbitraire, faite plus ou moins inconsciemment
par les Hommes,
pour les Hommes, et selon des critères qui en réalité ne sont applicables qu'aux Hommes eux-mêmes (mais on les applique quand-même à tout le monde vivant).
Donc quand on dit (moi inclus) que les conditions d'élevage sont immorales, c'est bien entendu un point de vue anthropocentrique. Car la morale, ça me travaille et ça conditionne mon bien-être (faire du mal aux autres me fait du mal), mais les singes et les géraniums s'en contrefichent peut-être... Par contre, en tant qu'être vivant sur la même planète que nous les humains, les géraniums ne se contrefichent pas des saloperies qu'on déverse dans l'atmosphère et les nappes phréatiques, et les singes ne se contrefichent pas des forêts qu'on transforme en papier d'emballage de produits Bio.
[*] anthropocentrisme (philo) : Doctrine ou attitude philosophique qui considère l'homme comme le centre de référence de l'univers.