Pékin pousse ses pions dans la guerre du pétrole
Bateaux de pêche en mer de Chine. Crédits photo : KHAM/REUTERS
INFOGRAPHIE - Les incidents se multiplient avec le Vietnam. L'Inde, grand rival de la Chine, menace d'entrer dans cette dangereuse danse navale. La guerre du pétrole fait rage en
mer de Chine du Sud. Pékin a demandé jeudi au Vietnam de cesser ses prospections en hydrocarbures dans ces eaux disputées. «Le Vietnam doit immédiatement y stopper ses activités unilatérales portant sur le pétrole et le gaz», a affirmé le ministère des Affaires étrangères. Il a ajouté qu'Hanoï devait arrêter «d'intercepter les navires de pêche chinois», évoquant un incident récent, sans plus de précisions.
Deux jours auparavant, c'est le Vietnam qui avait accusé la Chine de «sabotage maritime». Selon Hanoï, le navire de recherches géologiques Binh Minh-2 du groupe d'État PetroVietnam opérait dans ses eaux territoriales lorsqu'il a été «pris en chasse par une flotte de bateaux de pêche chinois qui ont coupé ses câbles sismiques». L'incident aurait eu lieu sur le Bloc 113, possédé conjointement avec le russe Gazprom.
Pékin conteste la version de l'incident et assure qu'il s'est produit en dehors du golfe du Tonkin, près de l'île chinoise de Hainan. La semaine dernière, l'Administration nationale de l'énergie chinoise a rendu publics des plans faisant de la mer de Chine méridionale la «plus importante» zone pour la production de gaz offshore.
«La Palestine de l'Asie»Ces nouvelles tensions ont conduit l'Inde à entrer dans un jeu déjà dangereux. Delhi s'est dit prêt à dépêcher des bâtiments en mer de Chine méridionale pour protéger ses moyens de prospection pétrolière. Si les Indiens n'ont pas de revendications territoriales dans la région, ils y ont des intérêts économiques. Le navire Binh Minh-2 venait ainsi d'opérer dans le bassin de Nam Con Son, où se trouve un gisement de gaz vietnamien, dans lequel la compagnie indienne Oil and Natural Gaz Corp (ONGC) possède une participation. «Dans des situations où les intérêts nationaux comme ceux de l'ONGC sont en jeu, notre présence est requise et nous y sommes prêts», a déclaré l'amiral D.K. Joshi, chef d'état-major de la marine indienne. L'irruption dans cette danse nautique du grand rival de la Chine ne ferait qu'exacerber les tensions.
La situation s'est encore détériorée ces derniers jours avec l'annonce par la Chine de l'extension des droits de sa police à partir du 1er janvier, pour arraisonner et expulser des navires croisant dans cette mer qu'elle dit relever de sa souveraineté. Le Vietnam comme les Philippines se sont insurgés, Manille parlant même de «comportement dictatorial». Washington souhaite des «clarifications» sur cette nouvelle législation qui peut porter atteinte à la liberté de navigation. En réponse, le premier ministre vietnamien a signé un décret autorisant le déploiement, à partir du 25 janvier, de nouvelles patrouilles pour arrêter les bateaux étrangers dans les zones de pêche vietnamiennes.
Il y a dix jours, la Chine avait déjà suscité une flambée de colère régionale en émettant de nouveaux passeports, sur lesquels figure une carte englobant les zones maritimes revendiquées. Les gardes frontières vietnamiens ont refusé de les tamponner, accordant des visas sur une feuille séparée. Certains secteurs sont revendiqués par les Philippines, Taïwan, le Vietnam, Brunei et la Malaisie. La semaine dernière, le secrétaire général de l'Asean (Association des pays d'Asie du Sud-Est), Surin Pitsuwan, s'est alarmé que la région ne devienne la «Palestine de l'Asie». Un parallèle qui n'est guère rassurant.